Document : 1772-06-01
Références / localisation du document
BM Bordeaux, MS 1480, f°84-88 // f° 53
Date(s)
1772-06-01
Auteur ou organisme producteur
Lemoyne
Destinataire
de Boynes
Résumé et contenu
L. à de Boynes à propos des familles réfugiées de SPM, à propos de l'établissement du rôle et à propos de la transmission aux conjoints du "privilège d'Acadien".
Des familles de l'Acadie, de l'île Royale et des familles européennes se sont retirées à SPM. Le roi accordait le même traitement aux familles de l'Acadie et de l'île Royale.
Dangeac a reçu ordre de réduire les secours à un nombre donné de familles. Il a mal compris : renvoi de toutes les familles surnuméraires, mêmes celles qui avaient des établissements. A leur arrivée en France, pas de ressources, retour à Miquelon aux frais du Roi pour certaines. Les autres familles (acadiennes ou de l'île royale, renvoyées de SPM) furent employées sur le rôle des familles acadiennes.
En dépouillant les registres à Rochefort et La Rochelle, Lemoyne s'est aperçu de la confusion, et estime que "S'il est certain que les droits des uns et des autres aux bontés du Roi sont différents, il faut une décision qui les fixe."
Le Roi veut établir les familles acadiennes. Pour les familles de l'île royale, ses intentions sont connues [mais on ne sait pas ce que c'est]. Pour L., il faut faire un rôle séparé.
Praslin a pris des dispositions pour toutes les familles de l'AS. L. préconise que les réfugiés de SPM puisse en bénéficier maintenant qu'elles sont en France.
Lemoyne est en train de dresser un rôle des familles acadiennes (à partir de rôles qui lui ont été envoyés de Rochefort, Brest et La Rochelle. Il attend toujours ceux de SM et du Havre où les A. sont très nombreux.
Demande si : a. le rôle ne doit contenir que les familles "véritablement et entièrement (?) acadiennes." ; b. "Les maris identifient-ils leurs femmes non acadiennes à leur famille, je le crois de Droit." ; c. "les filles acadiennes mariées à d'autres que des Acadiens communiquent-elles à leur maris et à leurs enfants le privilège, pour ainsi parler, d'Acadiens, ou s'il ne reste subsistance que sur leur seule tête ?" ; d. que faire des familles originairement de l'Acadie qui se sont établies à l'île Royale ensuite ?
Lemoyne projette de diviser le rôle (des familles de l'île Royale ?) en deux : 1. pour les familles établies à Miquelon au moment de l'octroi des grâces ; 2. les familles qui ont joui des grâces sans aucun droit réel.
Le document fait plusieurs fois allusion à des arrangements pris par le duc de Praslin pour les familles [de l'île Royale] établies en France, qui leur a octroyé des "grâces"
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1 juin 1772 - 25 - Le Moyne. Mémoire adressé à M. de Boynes f° 84
Copie du mémoire de M. Le Moyne à M. de Boynes du 1er juin 1772.
Mémoire
Plusieurs familles de l'Acadie se sont retirées aux Îles SPM. Plusieurs propres [mot légèrement tronqué, mais sûr à 80 %] de l'île Royale et d'autres [familles] européennes qui s'y étaient établies se sont aussi retirées dans ces îles lors de leurs établissements.
Le Roi y accordait le même traitement aux familles acadiennes et à celles provenant de l'île Royale, nulle distinction.
En 1767, M. Dangeac, gouverneur de ces îles, eût ordre de réduire le secours accordé par le Roi à un nombre déterminé de familles. Il entendit qu'on lui ordonnait de réduire la peuplade à ce nombre ; en conséquence, il fit son choix et renvoyant en France indistinctement toutes celles qui l'excédaient [ce nombre], non seulement celles qui étaient suffisamment établies pour se passer du secours qu'on leur aurait retiré, mais même celles qui avaient des établissements qui leur procuraient les aisances de la vie. Toutes furent obligées de céder aux habitants réservés, à tel prix et condition qu'ils voulurent, non seulement leur mobilier, mais même les établissements qu'elles avaient formée à grand frais et peines, le plus grand nombre à leur arrivée en France se trouva sans la moindre ressource. Celles à qui il restait quelque moyens demandèrent à repasser à Miquelon. La permission leur en fut donnée : le Roi fit les frais de leur retour.
Il fut ordonné d'employer sur le rôle des Acadiens qui étaient en France les familles renvoyées qui étaient forcées d'y rester. Les familles acadiennes et celles provenant de l'Île Royale furent traitées de même.
En dépouillant les rôles qui m'ont été remis de Rochefort et de la Rochelle, je me suis aperçu que ce défaut de distinction avait nécessité des abus et qu'on avait suivi la maxime de "in dubiis favores sunt ampliundi...." [dans le doute on met en oeuvre ce qui est le plus favorable.. ; [ou] dans les moments critiques on augmente les faveurs] puisqu'il se trouve plus de familles de l'île Royale sur ces rôles que de familles acadiennes. S'il est certain que les droits des uns et des autres aux bontés du Roi sont différents, il faut un décision qui les fixe.
Le Roi veut établir les familles acadiennes dans le Royaume et les rendre propriétaires de terrains. Cette grâce peut-elle s'étendre aux familles de l'île Royale portées aujourd'hui sur le même rôle ? Je ne le crois pas, parce que les volontés du Roi au regard des familles de l'île Royale est connue ; elle a fait la charge des arrangements faits pour elles, consignées aux états de la subsistance qui leur a été accordée. Je pense donc qu'elles doivent faire une classe séparée.
Quelques unes de ces familles étaient établies à Miquelon lors de l'arrangement définitif fait par M. le duc de Praslin pour toutes celles de l'Amérique septentrionale, qui pour lors étaient en France. Elles ne furent point comprises dans l'arrangement parce que le traitement que le Roi leur accordait a Miquelon leur en tenait lieu.
Ces familles renvoyées forcément, et après avoir épuisé pour former des établissements qui leur sont tombés (?) en pure perte, le peu de moyens qu'elles avaient pu sauver de leur désastre de l'Île Royale sont je le crois dans le cas d'espérer du Roi les mêmes grâces qu'elles en ont obtenues, si elles eussent alors été en France.
Monseigneur ne rejettera pas cette observation. Elle est trop d'après ses sentiments.
Monseigneur m'a donné ordre de dresser le Rôle général des familles acadiennes.
C'est d'après ce rôle que Monseigneur statuera sur les grâces à accorder à ces familles, il doit donc lui mettre sous les yeux avec la plus grande vérité les familles de chaque individus, pour déterminer ses ordres ; soit qu'il veuille les établir sur des terrains et en faire des cultivateurs, soit dans les lieux ou sans les assujettir à la culture, il pourrait leur procurer les moyens de subsister par eux-mêmes, soit enfin pour conserver un secours de subsistance à ceux hors d'état de gagner leur vie.
Je n'ai encore pu travailler que d'après les rôles de Rochefort , la Rochelle et Brest, ceux de Saint Malo et du Havre qui sont très nombreux ne me sont point encore parvenus, je les attends à tout moment.
Pour que je puisse remplir les vues de Monseigneur je le supplie d'avoir la bonté de me donner ses décisions sur les questions suivantes, elles détermineront l'établissement du rôle général :
1° le Rôle général à dresser ne doit-il être formé que de familles véritablement et entièrement (?) acadiennes.
2° Les maris identifient-ils leurs femmes non acadiennes à leur famille, je le crois de Droit.
3° les filles acadiennes mariées à d'autres que des Acadiens communiquent-elles à leur maris et à leurs enfants le privilège, pour ainsi parler, d'Acadiens, ou s'il ne reste subsistance que sur leur seule tête ?
4° Les familles qui, originairement de l'Acadie, se sont établies à l'île Royale et ont participé aux grâces comme familles de l'île Royale, peuvent-elles être comprises au Rôle général comme de l'Acadie ? Je le crois, en supprimant néanmoins les grâces encore existantes.
Si je dois former un rôle des seules familles acadiennes proprement dites, il est indispensable, que j'en dresse un de toutes celles provenant de l'île Royale, ou autrement qui ont été confondues avec elles.
Je projette de le diviser en deux titres :
au 1er seront employées toutes les familles de l'île Royale qui, établies à Miquelon, lors de l'arrangement fait par M. le duc de Praslin pour celles qui étaient en France, n'ont pu participer aux grâces ainsi qu'elles l'eussent fait.
au 2° seront employées toutes celles qui n'ayant aucun droit réel aux secours accordés pour le Roi en ont jouit cependant par des motifs particuliers.
Les apostilles détermineront les décisions de M. soit à conserver le secours soit à le rayer.
Je pense ce que travail qui mettra M. en État de juger des abus bénéficiera considérablement au Roi,
Le Moyne.
Nota : a été ajouté un extrait timbré ainsi
Extrait du mémoire ci joint auquel M. est supplié de porter ses décisions pour être envoyé au S. le Moyne auquel il a confié le travail nécessaire pour lui mettre sous les yeux l'État actuel des familles acadiennes et les moyens de remplir ses vues à leur égard.
1° le rôle général à dresser ne doit-il être formé que de familles véritablement et entièrement acadiennes
2° les maris identifient-ils etc.....
Notes
1 juin 1772 - 25 - Le Moyne. Mémoire adressé à M. de Boynes f° 84
Mots-clés
// identification du conjoint au privilège d'Acadien
// familles européennes
// statut d'acadien
// SPM
// secours (différence île Royale, SPM, Acadiens, privilèges)
// recensement (en cours)
Numéro de document
000109