Document : 1778-01-04

Références / localisation du document

ADIV C 6176

Date(s)

1778-01-04

Auteur ou organisme producteur

subdélégué de Nantes, Ballays

Destinataire

intendant de Bretagne

Résumé et contenu

Les députés ayant rencontré Necker font part aux Acadiens de Nantes de l'obligation de se disperser. Réaction des Acadiens : opposition de JJ Leblanc (entraîne 20 familles et demandent la Louisiane). Les autres acceptent : choix de rester à Nantes (450 pers.) ou d'aller à SPM (200), SM (160), Le Havre, 80 à la Dianne (= Guyane).

A fait assembler les Acadiens pour leur annoncer la volonté du Roi de les disperser et leur laisser choisir un lieu "sous la domination française". Première réunion : pas grand chose de décidé : les deux députés n'étant pas "avoués par la généralité" (les députés ne font sans doute que rapporter ce que leur a promis Necker ; cf; les comptes-rendus subséquents : 1778-06-00 ; 1778-04-25 par exemple et cf. notes). Se sont assemblé ensuite le 2 janvier. Une seule opposition au projet : "Jacques Le Blanc", esprit violent, etc. Réclame d'aller en Louisiane "où sont ses parents, ce qu'il sollicite a-t-il dit depuis 20 ans". Une vingtaine de familles se joignent à lui. Vont présenter un mémoire. Tous les autres acadiens ont accepté. 450 personnes veulent rester à Nantes ; 200 veulent aller à SPM ; 160 à SM ; 4 au Havre ; quelques familles attendent le retour du mari, en mer ; une ou deux familles à Paimboeuf ; 80 familles veulent aller à la Dianne [sic ; en fait, Guyane, cf. notes]. Attendent des nouvelles d'une compagnie qui leur a fait des propositions. Tous ceux qui veulent se disperser le veulent bien aux conditions promises par le directeur général : deux ans de solde, transport gratuit jusqu'au lieu choisi et (peut-être) réglement de leurs dettes puisque le montant des dettes doit être envoyé prochainement.

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A Nantes, le 4 janvier 1778.

Monseigneur,

J'ai l'honneur de vous prévenir que conformément à vos ordres du 24 décembre dernier j'ai fait assembler les Acadiens par les deux députés qu'ils ont envoyés à Paris et auxquels M. Necker a annoncé lui-même les volontés du Roi sur leur dispersions, et sur la liberté qui leur était laissée de choisir tel lieu qui leur conviendrait sous la domination française. Cette première assemblée n'a pas produit un grand effet, parce que ces deux députés n'ayant pas été avoués par la généralité, le compte qu'ils ont rendu a été suspecté par la majeure partie.

Ils ont désiré s'assembler chez moi, ce qui a été fait le deux de ce mois [2 janvier 1778], un seul d'entre eux nommé Jacques Le Blanc [sic], esprit violent, inquiet et séditieux a trouvé mauvaise la proposition que je leur ai faite de se diviser dans les différents endroits du Royaume où ils croiraient avoir le plus de ressources. Il a parlé avec chaleur, sur l'injustice de ce projet et sur la cessation de la solde et a fini par déclarer qu'il voulait se retirer à la Louisiane où sont ses parents, ce qu'il sollicite, a-t-il dit, depuis vingt ans. Il a entraîné dans son parti une vingtaine de familles qui doivent présenter avec lui un mémoire à sa majesté pour être autorisées à se retirer dans cette partie de la domination espagnole. Tous les autres Acadiens ont pris un parti sans murmurer et sans se plaindre. 89 familles composées de 447 individus sont dans l'intention de rester à Nantes. 39 familles, faisant 199 individus se sont décidées pour les îles Saint-Pierre et Miquelon. 36 autres, composées de 160 individus ont choisi Saint-Malo. Une famille composée de 4 personnes a pris le Havre et une autre de trois s'est fixée à Paimb?uf. Sept à huit familles dont les chefs sont en mer ont demandé [d'attendre] leur retour pour se décider. Environ 90 familles ont pris le parti de se retirer à la Dianne [sic]. Je ne vous donne rien de certain à cet égard parce que leur choix subordonné aux promesses qui ont été faites aux deux députés par une compagnie de Paris qui paraît vouloir former un établissement dans cette île variera si ces offres très avantageuses ne sont pas entretenues, ce qu'ils sauront dans le cours de cette semaine. Je dois au reste vous observer que toutes ces familles ne se sont décidées que sur la foi des promesses faites par M. Le Directeur général aux deux députés, de les faire transporter aux frais du Roi dans le lieu choisi, et de leur payer à leur arrivée 2 ans de solde à raison de 3 sols par jour. J'aurai l'honneur de vous adresser incessamment l'état général de leurs dettes.
J'ai l'honneur, etc...

Ballays

Notes

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l'allusion dans ce texte à "La Dianne" est quasi certainement une allusion à la Guyane. Le terme "Diane" dans un sens géographique n'apparait pas dans les dictionnaires anciens (Littré, DA, Trévoux), ni dans plein texte universalis, ni dans bases communes françaises.
Par ailleurs, plusieurs textes légérement postérieurs font allusion à ces offres concernant la Guyane (et par ailleurs du fait que la compagnie ne donne pas les détails attendus par ces 80 familles) :

1778-04-25 :
C'est dans cet état que je les ai trouvés lorsque j'ai été chargé du département des finances : on pensait alors à leur former des établissements en Corse ; et cette spéculation avait déjà pris quelque consistance, puisque 516 familles avaient accepté les conditions que M. Taboureau [C.G. alors] leur avait fait proposer ; mais dans le temps même que touché de l'excès de la dépense et de l'incertitude du succès je m'occupais d'un moyen plus simple et moins cher, deux Acadiens qui se sont dits députés de tous les autres sont venus m'apprendre ce que je soupçonnais déjà, que les Acadiens qui avaient autrefois montré de fortes préventions contre la Corse, n'avaient accepté de s'y établir que dans la crainte d'être privés de la continuation de leur solde en le refusant.

j'ai appris qu'il leur en était encore fait de plus favorables de la part d'une compagnie qui se dit concessionnaire d'un territoire considérable dans la Guyane, et qui en rétrocéderait aux Acadiens de fortes parties avec des secours en esclaves, en argent et denrées proportionnées à l'étendue de cette entreprise.

Cette proposition ne pouvant pas manquer de partager les suffrages des Acadiens dans un moment où ils délibéreraient sur le choix de leur état, j'ai demandé d'en connaître les conditions principales ; on vient seulement de m'en envoyer la copie ; mais on ajoute que la Compagnie de Guyane n'ayant donné aucune de ses nouvelles aux Acadiens, depuis le mois de janvier, ils commencent à douter de la réalité des offres qu'elle leur a fait faire.

Mots-clés

// RED
// Nantes
// repartir : Louisiane, Guyane, SPM, France (Nantes, SM, Paimboeuf, Le Havre)

Numéro de document

002183