Document : 1772-04-12

Références / localisation du document

BM Bordeaux, MS 1480, f°57-63 // 39

Date(s)

1772-04-12

Auteur ou organisme producteur

Lemoyne

Destinataire

Saint-Victour

Résumé et contenu

Le Moyne à Saint-Victour à propos de l'établissement des Acadiens sur ses terres.
Rien de particulier. Lemoyne relance Saint Victour et lui demande des détails et un projet concret sur l'établissement des Acadiens. Il lui demande de tâcher de convaincre ses voisins et de dire ses conditions pour que le ministre puisse délibérer, mais plus les conditions faites aux Acadiens seront bonnes et plus le ministre sera content.
[voir la réponse de Saint-Vicour fiche # 119]

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copie de la lettre écrite à M. de Saint-Victour gouverneur de la ville de Tulle, le 12 avril 1772.

Lorsque j'ai eu, Monsieur, l'honneur de vous voir à Paris, je vous parlai de l'envie que M. de Boynes avait d'établir les familles acadiennes solidement en leur assurant quelque propriété. En effet, il ne peut être tranquille sur leur existence qu'autant qu'il les saura propriétaires d'un sol duquel il puissent tirer leur subsistance. Vous m'ouvrîtes, M., des idées que je trouvai d'autant meilleur que l'acadien y trouvait son avantage, le propriétaire le sien et que les vues du ministre étaient remplies.

Vous me proposâtes de disposer en faveur de quelques familles de petites métairies qui vous appartiennent et qui tiennent à des landes ou bruyères susceptibles de cultures, aux conditions d'usage dans la province ; de leur en passer baillette pour 9 ans même plus jusqu'à 20.
Vous m'expliquâtes, M., que le métayer dans la province recevait du propriétaire la métairie garnie en bestiaux de labour et les instruments aratoires et que même quelque fois il y a ajoutait un cheptel en bête à laine et à cornes : que le métayer faisait valoir les terres, prenait soin du cheptel et que pour son salaire il retenait la moitié des récoltes et aussi moitié dans les accroissements de cheptel. J'ai aussi ce me semble entendu que le métayer n'était obligé à aucune mise dehors.
Vous me faites l'honneur de me dire que, en sus des usagers ordinaires, et pour assurer à ces familles une propriété, leurs baillettes finies, vous conviendrez de leur abandonner en propriété la moitié des terres qu'elles défricheraient et en outre autant de friches qu'ils remettraient du défriché sauf les redevances d'usage dans la province, en sorte que si dans le cours de leurs fermes, elles défrichaient sans néanmoins négliger les terres de la métairie, si elles défrichaient dis-je 20 journaux, il leur en appartiendra 10 en toute propriété et 10 en landes susceptibles de cultures, et la redevance d'usage : qu'il serait fait deux lots dont un appartiendrait par choix au propriétaire, l'autre à la famille. Qu'en outre les établissements en bâtisse et logement quelconques fait par la famille et à ses frais ainsi que le sol adjacent ordinaire sur lequel ils seraient faits appartiendraient à la famille, hors partage des défrichés mais précompté sur le terrain friche qui leur serait remis à raison du défriché.

J'ai fait part de ces vues à M. de Boynes qui les a goûté et qui m'a autorisé à convenir avec vous de tout ce qui pourra convenir pour les réaliser ; il m'a même dit de vous engager, M., à faire en sorte que des gentilshommes de la province se portassent à prendre les mêmes engagements que vous prendriez.
Envoyez moi donc, M., un mémoire bien circonstancié de ce que vous pensez et projetez à cet égard : des conservations que vous désirez qui vous soient faites, des grâces particulières que vous croyez pouvoir être accordées à vous et aux gentilshommes qui suivront votre exemple ; en un mot mettez moi à même de traiter positivement cette affaire avec le ministre et de pouvoir la terminer.
Voici je crois ce qui doit former vos conventions : vous avez proposé de donner :
1° logement [demande de détailler exactement ce que cela comprend]
2° quantité de terre [demande encore des détails]
etc. liste complète jusqu'à 9 : toujours des demandes de détails, et il s'agit d'assurer des garanties que les Acadiens ne vont pas être spoliés ; détails sur les définitions à donner aux choses, par exemple qu'est-ce qu'un terrain défriché exactement ; existence de ruisseaux ;

Quant aux grâces du Roi, je pense que vous pouvez demander pendant deux années la somme que le Roi accorde à ce peuple qui est 6 sols aux individus de 10 ans et au dessus et de 3 sols [... bla bla] dessous de 10 ans ; de vous à moi, vous pouvez demander les 6 sous pour tous les individus, en proposant de remettre à la fin de la baillette de neuf années ou indistinctement au bout du temps fixé aux familles acadiennes dont vous vous chargerez les 2/3 de ce que vous auront produit dans la seconde année les 6 sols par tête, et ce valeur en bétail de labour et en ustensiles aratoires, à l'estime qui en sera fait par l'intendant de la province ou de son subdélégué. Car il faut un tiers désintéressé entre deux intéressés. Vous pouvez demander que les métairies que vous remettrez aux familles soient exemptes de tailles et regardées comme terres à défricher à raison des Acadiens, ou si on ne voulait pas se porter à l'exemption totale qu'au moins elles fussent taxées d'office pour le taux de la baillette sur le pied de la moitié de la taxe actuelle sans pouvoir être augmentée sous quelque prétexte que ce fut même à raison des augmentations de culture, les familles acadiennes ne devant pas être taillables pendant le temps qu'il est jugé nécessaire pour former solidement les établissements.
Vous pouvez encore demander que vos métairies occupées par les familles acadiennes soit exemptes de toute corvée royale et des grands chemins, hors le terrain de la ferme, et pour toutes autres que celles seigneuriales et qui toucheraient à l'utilité du service de la métairie même.

[Saint-Victour doit aussi détailler le nombre exact de personnes qu'il veut par métairie, par famille ;
demande une réponse rapide de Saint-Victour ; ses idées sont seulement des suggestions et peuvent se discuter en fonction aussi de ce que peuvent lui dire ses voisins ; si d'autres voisins sont intéressés, le ministre consentira sans problème à leur donner des Acadiens et à leur continuer les secours pendant deux ans "pourvu qu'on s'engage à leur établissement fait solidement de façon à leur assurer par des propriétés une subsistance produite par la culture. Voici à peu près sur quoi doit rouler [?] l'engagement qui sera pris :"
1° les loger ; 2° fournir les outils ; 3° les gros meubles de paysans ; 4. les premières semailles ; 5. 3 ans d'exonération d'impôt ; 6. pendant 3 ans (2 mini) de plus, prendre seulement 1/2 des taxes en usage dans la province ; 7. 6e ou 7e année : on peut appliquer la redevance la plus forte dans la province ; 8. estimation des avances : 1 500 # par familles (on pourra déduire de cette somme une partie des secours du gouvernement, mais pas tout).
Les rentes doivent être rachetables "il le faut pour exciter l'émulation".

"Plus les conditions seront favorables aux Acadiens, plus elles seront du goût de M. de Boynes et plus il se portera à faire accorder d'exemptions et les grâces promises (?) à ceux qui entreprennent des défrichements.

J'ai l'honneur....

Lemoyne

Post Scriptum :
Je vous prie M. de me faire le plaisir de me donner une note des prix ordinaires et connus (?) des articles ci-après

la paire de b?ufs de labour...
"les vaches d'espèce ni belle ni laide"

Notes

12 avril 1772 - 16 - Lettre de Le Moyne à M. de Saint-Victour gouverneur de la ville de Tulle f° 57

Mots-clés

// projet d'établissement
// Saint-Victour

Numéro de document

000100