Document : 1774-03-23b

Références / localisation du document

AN H1 1499 2, pièce 655 et pièce 606

Date(s)

1774-03-23b

Auteur ou organisme producteur

Pérusse

Destinataire

Bertin directeur du bureau d'agriculture (dépend du Contrôle Général) (?)

Résumé et contenu

Mémoire de Pérusse contre les rumeurs sur les Acadiens (not. procréation).

Pérusse invoque des circonstances atténuantes, parle de leur fidélité, du fait que, bien que "errants", ils n'ont jamais été l'objet de plaintes.
suit un état [non reproduit ici, mais cf. le document @ 1490 qui en est une sorte de copie] des familles acadiennes, pour prouver que les enfants sont nombreux.

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Mémoire sur les familles vraies acadiennes.

Il parait que des personnes peu humaines et peu compatissantes ont peint les Acadiens avec des couleurs bien noires, puisque les ministres les regardent comme des fainéants et gens lâches incapables d'être jamais d'aucune utilité au Royaume par leur travail ni même par leur population.
On n'a pas craint à cet égard de leur reprocher jusqu'au coupable renoncement au sentiment naturel qui porte tout individu au désir de se multiplier.
M. le marquis de Pérusse d'Escars, avec qui feu M. l'abbé Le Loutre était entré dans les plus grands détails sur le triste sort des Acadiens, qui même lui a légué le soin de les protéger après sa mort, l'avait prévenu de toutes les traverses qu'il avait éprouvées sur les vues d'établissement qu'il n'a cessé d'avoir pour eux mais toujours inutilement. Il a assez instruit M. le Marquis de Pérusse pour qu'il ose combattre les impressions défavorables qu'on a pu donner au ministre contre ces infortunés, qui loin d'être blâmés doivent au contraire inspirer à toute âme honnête la pitié par leurs malheurs. L'estime pour leur conduite et le désir enfin de les protéger et de voir mettre un terme à leurs maux par un établissement qui les fixe à jamais dans le Royaume et leur acquière le titre de sujets du Roi qu'ils ont toujours désiré avec ardeur.
Les Acadiens ont éprouvé des malheurs que peut-être ceux qui osent les dénigrer n'auraient pas supporté avec tant de vertu. Cette colonie toujours fidèle au Roi et qui leur a donné jusqu'à présent les preuves les moins équivoques de son attachement, jouissait dans le pays le plus fertile et le plus abondant de possessions très considérables. [suit une description des richesses mythiques des habitants]. [...]
Arrivés en France, quelle a été, et quelle est encore leur position ? Répartis sur les côtes de Normandie, de Bretagne et d'Aunis, ils y sont sans asile ni propriété quelconque, obligés de payer le loyer des masures dans lesquelles les habitants du pays ont bien voulu leur permettre de se retirer, en attendant qu'il plût au Roi de pourvoir à leur établissement. Que peuvent-ils faire de plus que de subsister eux et leurs enfants par leur travail ?
La paye que le Roi a bien voulu leur accorder quoique peut-être onéreuse aux finances n'a certainement pu suffire à leur subsistance. Depuis dix à douze ans ils ont essuyé beaucoup de maladies avant d'être acclimatés à la France. Un grand nombre a succombé et la mort a terminé leurs malheurs.
Doit-on être surpris que dans une position aussi cruelle depuis douze ans ne voyant point de terme à leurs maux il y ait parmi eux de l'engourdissement, de l'affaissement et même du découragement. Le désespoir assurément leur serait permis si la religion pouvait le tolérer. [...] Leur attachement et leur fidélité pour le Roi, leur probité et leurs moeurs [...] on se convaincra que depuis douze ans qu'ils sont en France, sans azile ni propriété, répandus sur les côtes, il n'y a aucun d'eux qui ait occasionné la moindre plainte des habitants du canton où ils ne sont cependant que comme errant.
Il est bien étonnant que d'après les faits ci dessus que personne ne peut contester, quelqu'un ait osé les peindre avec d'autres couleurs dans l'esprit du ministre.
Quant à la population à laquelle on les a accusé de se refuser on peut voir d'un coup d'oeil par l'état ci-joint qu'elle est prodigieuse. [...]

[la suite parle de l'intention de créer une école d'agriculture, RAS]

Notes

DSCN2354.JPG
DSCN2359.JPG le mémoire n'est pas signé, mais il est évident qu'il provient de Pérusse (cf. aussi le brouillon de sa main qui contient à peu près les mêmes informations (à propos de leur refus de se multiplier).
Mémoire non daté (date approximative) qui ne dit pas non plus qui est l'auteur de ces rumeurs (mais cf. notes ci-dessous) :
Le site archivescanadafrance.org a mis en ligne ce document et indique qu'il s'agit de la pièce 606. La photo du document est disponible en ligne, et ce n'est pas la même chose que le document que j'ai pris en photo moi-même, sauf que c'est mot à mot la même chose (je n'ai vérifié que pour la première et partiellement pour la dernière page). Surtout, le document est daté par le service d'archive de archivescanadafrance.org ; cette date n'est cependant pas visible sur le document (j'ai regardé la première et la dernière page). Il est curieux que je n'aie pas pris de photo de ce document ; je crois que la seule raison est qu'il devait déjà être parti pour la numérisation.

Mots-clés

// contraception
// familles vraies acadiennes
// errants - sans aveux
// procès (aucun)
// rumeurs
// perception
// logement (en familles)
// allégeance : ils souhaitent devenir sujets du Roi (sous entendu ils ne le sont pas)
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Numéro de document

001495