Document : 1772-09-03 // 1772-10-01

Références / localisation du document

BM Bordeaux, MS 1480, f°131-136 // f° 76-78

Date(s)

1772-09-03 // 1772-10-01

Auteur ou organisme producteur

Lemoyne

Destinataire

Bertin directeur du bureau d'agriculture (dépend du Contrôle Général)

Résumé et contenu

L. à Bertin : Lemoyne lui envoie ses vues sur l'établissement des Acadiens

Lui envoie le rôle des Acadiens (2 370 individus + 354 non Acadiens). Seuls les Acadiens doivent intéresser Bertin (attachement à la glèbe). Acadiens = ce "peuple fidéle", "ce peuple qui a tout sacrifié à sa fidélité ce qui pour cela seul mérite les bontés de sa majesté."
Lemoyne raconte l'origine de sa mission : Commissaire gal, occupe des familles allemandes puis réfugiés. Projet d'attachement à la glèbe. Prétend que de Boynes s'est depuis le début intéressé [hypocrisie, cf. ses lettres précédentes où il n'a pas de réponse de Boynes] à ce "peuple malheureux qui par les sacrifices qu'il a faits au Roi et à la religion mérite les bontés de sa majesté et la protection la plus décidée du gouvernement.". Appel de Lemoyne pour exposer les moyens pour l'établissement [les mêmes que pour les Allds].
Discussion un peu technique sur l'établissement possible des familles sur les terres du domaines, évocation du projet de SV qui est sur le point de commencer, Lemoyne reparle des familles allemandes et des projets d'assèchement de marais à côté de Rochefort, etc [résumé du document en fin de document]

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Copie du mémoire envoyé à M. Bertin le 3 septembre 1772.

Mémoire

Je remets à M. le Role des familles véritablement acadiennes le nombre en est de 626 formées par 2 370 individus. [en marge : 2 370 individus à 108 # par an: 255 960 # ; calcul vérifié et correct]
J'ai soustrait des différents rôles de Brest, Saint-Malo, Morlaix, Rochefort, Nantes, Le Havre Cherbourg et Dunkerque - il en est en résidence dans tous ces quartiers - les individus qui, quoique non acadiens étaient employés pour leur subsistance sur ces rôles par des motifs particuliers, sur des ordres ou sur des indications d'ordres donnés pour des positions semblables.
J'ai dressé un rôle à part de ses familles qui comprend 136 familles composées de 354 individus. [en marge : 354 individus à 108 # par an .... 38 232 # ; + 255 960 # = 294 192 #].

Les familles vraiment acadiennes sont celles qui fixent aujourd'hui l'attention de Monseigneur. Ce sont elles seules qui, par privilège, doivent jouir de sa protection, pour les bienfaits du Roi qu'il doit leur repartir, afin de les mettre en état de percevoir, par leur travail, à leur subsistance ainsi qu'à leur entretien. Ces bienfaits doivent leur assurer une existance non précaire, c'est en les attachant à la glèbe que Monseigneur voit la certitude de ses vues et en effet c'est le seul moyen.
1° de rendre les bienfaits du Roi utiles à perpétuité à ce peuple qui a tout sacrifié à sa fidélité ce qui pour cela seul mérite les bontés de sa majesté.
2° de soulager l'Etat d'une dépense considérable
3° enfin de faire tourner la dépense que leur exisance exige en profit réél à l'Etat même, par les produits qui, sous peu, en résulteraont ; jusqu'à ce moment on a consommé le grain, Monseigneur sans le semer.
Les ministres de la marine, depuis que ce peuple fidèle s'est réfugié en France, ont eu ces vues. M. de Boynes touché vivement de ce qui méritait ce peuple, désirait des moyens ; ils se sont refusés à ses désirs ; ils sont ouverts aujourd'hui, vous, Mgr, et lui allez travailler efficacement à son bonheur, il obtiendra par vous la récompense de sa fidélité. Depuis 1766 [sic], je me suis occupé de la recherche des moyens d'établir ces familles.
Des terres vagues et vaines non engagées, celles de même nature qu'on pouvait distraire des domaines engagés, celles mêmes domaniales incultes réunies et actuellement entre les mains des fermiers, me paraissaient pouvoir y servir. D'autres biens domaniaux aliénés sont [sur ?] de simples engagements à charge de redevances, pourraient (?) être retirés en dédomageant ou déchargeant les engagistes ; enfin, je vois des ressources dans la quantité de sols domaniaux incultes quoique susceptibles de bonnes cultures. Je pensais même que l'on pouvait retirer des communautés les terrains qui leur avaient été concédées pour les parties (?) seulement. dont elles ne faisaient point usage, ou qui étaient exhorbitantes à l'usage qu'elles en pouvaient faire, mais comment les faire destiner à cet usage, comment opérer pour y réussir. J'ai proposé ces moyens comme des vues à faire valoir par le gouvernement.
Il a été question en 1766 et 1767 d'établir en France et d'attacher à la glèbe les familles allemandes qu'on y avait attiré pour les placer dans les colonies. Je proposai alors de faire revivre les ouvrages entamés et abandonnés par une compagnie pour le déssechement des marais du Roi près Rochefort en associant ces étrangers à ce desséchement. J'ai eu les mêmes vues pour les Acadiens. Ce projet produisait non seulement les avantages d'une culture immense, mais aussi assurait la salubrité aux parties de l'Aunis et de la Saintonge qui les avoisinnent. Salubrité dont le port de Rochefort devait se ressentir (?).
Tout ce qui pouvait contribuer aux vues du ministre qui me témoignait de la confiance sur cet objet, me parut bon. Je sondai quelques propriétaires de terres susceptibles de culture ; mais qu'ils laissaient en friche faute de bras.
[fin de la transcription intégrale. Résumé :
Lemoyne fait de la publicité pour ce projet. Saint Victour mort à l'ameçon ; il demande des Acadiens pour lui même et communique avec Turgot qui réflechit à un plan plus général.
L'expérience pour S.V. est sur le point de commencer ; il lui a été envoyé des chefs de familles ; cela devrait permettre à l'exemple de se répandre et stimuler l'émulation ;
le mieux pour établir le plus d'acadiens possible et définitivement serait d'établir les Acadiens sur les domaines du Roi, qui sont très grands ; mais cette méthode est couteuse et l'Etat des finances ne le permet pas.
Idée proposée par L. donc : faire appel à des "capitalistes", des investisseurs privés, qui en échange de portions de terres concédées établiront les Acadiens.
Il faudra calculer les dépenses relatives aux Acadiens le plus précisément possible.]

Les ordres de M. dirigeront mon travail, je les exécuterai avec tout le zèle et les soins dont je suis susceptible et dont la confiance dont il voudra bien m'honorer me fera la devoir le plus précieux.
A Paris, ce 1er octobre 1772,

Lemoyne

Notes

deux dates figurent pour ce document : l'une "copie du mémoire du 3 septembre 1772" et tout à la fin "à Paris ce 1er octobre 1772"

// CS (coût des secours) : 255 960 livres (2370 individus à 108 livres / an)

Mots-clés

// perception : Acadiens = "peuple fidéle", qui a tout sacrifié.
// recensement : FE France 2,370 (+ BIM)
// allemands
// Saint-Victour
// secours : montant : 255 960 par an
// CS (coût des secours)

Numéro de document

000128