Document : 1768-01-22a

Références / localisation du document

RAPC 1905-II p. 313

Date(s)

1768-01-22a

Auteur ou organisme producteur

Pichon // Tyrrell

Destinataire

Pownall

Résumé et contenu

Lettre d'introduction de Pichon / Tyrrell pour des Acadiens qui sollicitent le passage en Acadie.

Pichon / Tyrrell a reçu deux députés acadiens en provenance de Saint-Malo. Ils disent représenter 500 personnes. Ils sollicitent l'autorisation de repasser en Acadie. Ils ne font pas partie de ceux qui ont pris les armes contre l'Angleterre à Beauséjour à l'instigation de leurs prêtres. Ils connaissent bien le pays et les cultures propres à le mettre en valeur. Ils ont fait déjà des arrangements avec des habitants de Jersey. Une personne du gouvernement anglais leur a laissé entendre qu'ils pourraient sans doute passer en Acadie. Ils affirment qu'ils pourraient inciter plus de 1000 personnes à venir (de SM). L'opération doit se faire dans le plus grand secret.

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Monsieur,

Vous connaissez mon attachement pour la G.B., j'ai fait mes preuves à cet égard et vous êtes plus en état que personne d'en sentir la solidité. Les services continuels que vous rendez à la nation par l'attention avec laquelle vous saisissez toutes les occasions de lui être utile, m'engage à vous faire part d'une circonstance qui se présente actuellement, et qui dans des mains aussi habiles que les vôtres peut devenir très importants pour peu que vous daigniez y jeter les yeux et la favoriser de votre protection. Voici le fait, Monsieur, on ne craint pas de vous être à charge quand on fournit des occasions de faire du bien.

Un homme de ma connaissance m'amena sur la fin d'octobre deux Acadiens récemment arrivés des environs de Saint-Malo et qui étaient comme députés de plus de 500 colons de la Nouvelle-Écosse. Ces derniers sont aussi dans les environs de cette même ville où ils attendent le résultat de la négociation de leurs deux compagnons. Voici ce que j'ai pu reconnaître du but de leur dessein : comme ils avaient vécu dans l'Acadie où ils sont nés avec des établissements honnêtes jusqu'au temps où les sujets de Sa Majesté Britannique firent la conquête de cette presqu'île, leur attachement pour leur patrie leur a fait concevoir le projet de demander au Gouvernement la faveur d'y retourner et s'y établir sous la promesse qu'ils font de faire serment d'obéissance et de fidélité à Sa Majesté, et de se conduire en bons et loyaux sujets de la Couronne d'Angleterre. Outre la bonne foi de ces gens, sur laquelle je ne doute pas, Monsieur, qu'on ne puisse compter, il est à observer qu['ils] ne furent point de ceux qui à la sollicitation des prêtres prirent les armes pour défendre le fort de Beauséjour, lorsqu'il fut pris, et que n'ayant plus à risquer d'être trompés par les missionnaires français qui avaient eu la cruauté de les rendre suspects au gouvernement, ces bonnes gens vivant sous une administration aussi tranquille que celle qui fait le bonheur des colonies anglaises, deviendront sans contredit des sujets très affectionnés et vraisemblablement très utiles ; je dis très utiles et vous en sentirez Monsieur, mieux que moi la raison. Nés et habitués à vivre dans l'Acadie, il est sûr qu'à cet égard à la connaissance qu'ils ont du pays et de l'espèce de culture la plus propre à en féconder les productions, on pourrait tirer d'eux bon parti pour instruire à ces divers égards les nouveaux colons que le gouvernement y envoie et encourager leurs travaux par leur expérience et leur industrie relativement plus experte.
Je soumets ces observations à vos lumières, Monsieur, je joins ici le placet au Roi que j'ai consenti à dresser en faveur de ces gens dont j'ai connu la plus grande partie. Si vous jugez à propos à approuver ce que j'ai l'honneur de vous exposer, je crois qu'il en peut résulter un avantage ce que j'ai l'honneur de vous exposer, je crois qu'il en peut résulter un avantage réel pour les possessions de sa majesté britannique dans la Nouvelle-Écosse. Ils consentent d'aller où on jugera à propos de les envoyer, leur patrie leur est chère. Je souhaite que ce projet vous paraisse mériter votre attention. J'aurai rempli alors mon but qui est depuis longtemps d'être utile à une Nation à laquelle je me suis consacré par attachement et pour qui, vous le savez, j'ai tout sacrifié.

J'ai l'honneur d'être, etc... Tyrrell

Woodstock Street, Oxford Road, le 22 janvier 1768.

P.S. Les deux Acadiens pendant leur séjour ici et qui me fut à charge, se présentèrent à Monsieur Maclaine qui promit de leur délivrer ce qui leur est nécessaire pour se rendre tous à la Nouvelle-Écosse. Monsieur Maclaine m'ayant fait dire de l'en faire souvenir, je l'ai fait plusieurs fois et en ai reçu les mêmes promesses. Je lui avais donné avec le placet au Roi la lettre dont je l'avais accompagné pour Mylord Shelburne. Comme le département des colonies est devenu celui de Mylord Hilssbourong, j'ai cru, Monsieur, devoir m'adresser à vous. Ces bonnes gens ont déjà pris des mesures et fait conventions avec quelques habitants de l'île de Jersey pour pouvoir partir en mars prochain et réintégrer de bonne heure dans leur patrie. Il conviendrait donc d'expédier au plus tôt ce qui leur est nécessaire à cet égard. Il n'est pas moins nécessaire qu'il n'en transpire rien.

Les deux députés me dirent en partant qu'ils pourraient être plus de mille qui désirent comme eux de retourner dans leur ancienne patrie.

Endossée : M. Tyrrell à M. Pownall, reçue le 23 janvier.

Notes

cf. aussi la pièce suivante = pétition des Acadiens eux-mêmes.

Martin parle de ce projet p. 89 : [à propos de cette lettre. "Nous sommes certains, en tout cas, que les deux Acadiens avec lesquels il [Pichon-Tyrell] prétend avoir négocié cette trahison, Pierre Duon et Pierre Henry, ne l'ont pas suivi. [note : il y avait bien effectivement un Pierre Duon et deux Pierre Henry parmi les Acadiens de SM, comme en fait foi le "rôle" qui fut dressé par les soins du commissaire général Lemoyne en 1772. Mais nous retrouvons le premier, Pierre Duon, en Poitou, ainsi qu'un des Pierre Henry ; et le deuxième Pierre Henry s'embarqua de SM pour la Louisiane en 1785, comme en fait foi le rôle d'équipage de SM, année 1785, n° 147, aux Archives de la marine à Brest.]
Or ceci est faux.

Mots-clés

// repartir : Acadie
// nation : Angleterre
// désertion
// UK
// Nouvelle-Ecosse
// Jersey
// Pichon
// Robin

Numéro de document

001551