Document : 1776-00-00

Références / localisation du document

ADV J dépôt 22, art. 124-1

Date(s)

1776-00-00

Auteur ou organisme producteur

Pérusse

Destinataire

Case de la Bauve [Bove] intendant de Bretagne // Blossac

Résumé et contenu

Projet de réponse à faire par M. de Blossac à la demande que lui fait M. Case de la Bauve [Bove] intendant de Bretagne d'éclaircissement sur les Acadiens. (vers 1776 ?)

Case de la Bove demande ce qu'il pense des Acadiens et les raisons qui les ont amenés à quitter le Poitou. Que du bien à dire de leurs moeurs, mais paresse (à cause de la solde qui les a perdus) et cabales intolérables. Le plus grand nombre n'est plus capables de travaux suivis (seulement de gagner quelque argent dans les ports). Les anciens avaient le souvenir des cultures et s'y serait remis, mais les jeunes ont a peine connu l'Acadie. Or ce sont les jeunes qui gouvernent : ils ont été gagnés par la licence des villes maritimes. Il n'est pas surpris que Pérusse ait vu la cabale et l'intrigue (dénonce en particulier JJ Leblanc). Refus de travailler, sous le prétexte qu'on leur avait promis les meilleurs terres du Royaume. Ceux qui voulaient s'y mettre étaient menacés. (voici la cause de leur sortie du Poitou). Plaint les Acadiens victimes de cette cabale. Doute qu'ils puissent trouver mieux que dans ce pays. "Ces gens là ne veulent que se prolonger la durée de la solde, se flattant toujours de retourner en Acadie. Propose de demander à Pérusse plus de détails.


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Projet de réponse à faire par M. de Blossac à la demande que lui fait M. Case de la Bauve [Bove] intendant de Bretagne d'éclaircissement sur les Acadiens. (vers 1776 ?)

Vous me demandez, Monsieur, ce que je pense des Acadiens que nous vous avons envoyé à Nantes et quelles sont les raisons qui les ont déterminés à quitter le Poitou après un séjour de près de trois ans qu'ils y ont fait. Je vais répondre à vos demandes en vous disant que nous n'avons généralement que du bien à dire de leurs moeurs, mais que leur paresse est intolérable ainsi que les cabales et menées de quelques uns d'eux qui veulent conduire et gouverner les autres et qui y réussissent. Ils sont accoutumés depuis 18 ans à recevoir une solde du Roi au moyen de laquelle ils ont presque tous perdus l'habitude du travail et excepté quelques uns dont le nombre est peu considérable et qui je crois nous doivent rester. Les autres sont en général peu propres à autre chose qu'à la navigation ou à certains ouvrages qu'on trouve communément à faire sur les ports de mer et auxquels on gagne quelque argent dans le besoin sans sa sujétion à des travaux suivis dont le grand nombre n'est point capable. L'agriculture leur a paru trop pénible et exiger trop de suites. Quelques anciens peut-être se seraient encore ressouvenus d'avoir cultivé en Acadie et auraient pu s'y remettre mais ceux là sont peu nombreux en comparaison des jeunes hommes de 35 à 40 ans qui ont à peine connus l'Acadie et n'ont pu y prendre l'habitude et le goût du travail. Et ces derniers, qui priment et gouvernent en quelques sorte les anciens paraissent avoir des principes forts différents de ceux de leurs pères. La licence qui règne communément dans les villes maritimes les a déjà gagnées et la vie tempérante et frugale qui convient au cultivateur ne saurait leur convenir. Je ne suis point surpris que M. de Pérusse se soit aperçu qu'il règne parmi eux de la cabale et de l'intrigue, ils ont un Jean Jacques Le Blanc entre autres qui est venu exprès de Saint-Malo accompagné de quelques uns de ses disciples pour cabaler en Poitou contre l'établissement que la Cour avait fait commencer pour eux. Il a été soutenu peut-être dans ses menées par quelques gens du Pays qui semblent fâchés de voir changer les immenses terrains incultes qui y existent en des champs bien cultivés. La suite de cette cabale a été d'empêcher ceux qui depuis 18 mois étaient dans leurs nouvelles habitations munis de bestiaux et d'instruments aratoires d'y faire aucun travail [usant même de menaces contre ceux qui satisfaits de leur sort voulaient défricher leurs terrains, barré], sous le prétexte disent-il que les terres qu'on leur donne en Poitou ne sont pas aussi bonnes que celles qu'ils ont abandonnées en Acadie. Et que d'ailleurs le feu Roi leur a fait promettre à ce qu'ils prétendent de les établir sur les meilleurs terrains de son Royaume, et que des terrains incultes quels qu'ils soient ne peuvent être regardés comme les meilleurs terrains du Royaume puisqu'il faut de grands travaux et de grandes dépenses pour les rendre productifs. D'après cela, ils n'ont pas voulu donner un coup de charrue et si quelques uns qui étaient et sont contents des grâces très considérables assurément que le Roi leur accordait dans cette province voulaient travailler leurs terrains les autres employaient les menaces pour les empêcher. Voilà la cause de leur sortie du Poitou. M. de Pérusse plus en état que personne de vous donner des connaissances particulières sur ce peuple auquel il a donné les plus grands soins en tous genres, et dont en vérité je le regarde comme très heureux d'être débarrassé, je les plaints cependant de s'être laissés aller aux mauvais conseils d'une cabale qui les conduit aussi mal et qui certainement les perdra car je doute qu'ils trouvent ailleurs de meilleurs terrains. Et même d'aussi bons et qu'ils aient des habitations mieux que celles qui ont été construites dans ce pays ci pur eux et surtout qu'ils puissent avoir plus de grâces et de secours que nous ne leur en avions obtenus. Les bons travailleurs qui se sont déterminés à en profiter sont plus sages que les autres. Je doute qu'on puisse jamais en tirer parti pour des établissements d'agriculture. Ces gens là ne veulent que se prolonger la durée de la solde, se flattant toujours de retourner en Acadie. Au reste, M. de Pérusse a dit écrit et fait le possible pour eux. Je suis persuadé que si vous désirez de lui quelques détails particuliers il se fera un plaisir de vous les donner.

Notes

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non daté

Encore un exemple de lettres que Pérusse écrit en se faisant passer pour un autre.

Mots-clés

// perception : bonnes moeurs mais paresse intolérable
// clash de génération
// repartir : Acadie
// culture
// Poitou
// menaces
// secours : cause de leur perdition

Numéro de document

001779