Document : 1776-08-31
Références / localisation du document
ADV J dépôt 22, art. 124-1
Date(s)
1776-08-31
Auteur ou organisme producteur
CG [Turgot] // peut-être Pérusse [à vérifier, voir notes]
Destinataire
Pérusse [à vérifier]
Résumé et contenu
CG (?) à Pérusse. Instructions sur la continuation et suspension des secours aux Acadiens à Nantes. Impossible de continuer les secours puisque les Acadiens ne se décident pas à peupler le royaume et à s'adonner à l'agriculture.
Malgré le départ des Acadiens du Poitou, Pérusse reste chargé de ceux passé à Nantes. Le Roi a exprimé de la surprise et du mécontentement devant le refus des Acadiens de s'établir dans le Poitou. Fustige le peu de zèle, l'esprit de cabale, les plaintes : tout ceci prouve que "ce peuple" est peu disposé à se fixer dans le Royaume et à travailler à l'agriculture. L'intention du roi n'est plus de distribuer à tous les mêmes secours, mais en fonction de leur facilité à trouver du travail et de leur conduite passée. Tous auront la solde jusqu'au 1er janvier 1776 et Pérusse est prié de la payer (sauf quelques familles à qui elle sera supprimée). Les premiers et seconds convois (= navigateurs) n'auront plus la paye, éventuellement charité si nécessaire. Le troisième convoi doit recevoir 2 sols par jours jusqu'au 30 juin. Le quatrième convoi (familles agricoles) auront 2 sous par jour jusqu'au 1er juillet. Si parmi les familles des précédents convois il y a des familles agricoles qui n'ont pas abandonné les maisons dont elles jouissaient en Poitou, il est possible qu'elles soit jointes à l'Etat du quatrième convoi. Demande de faire passer l'état des vieillards infirmes et orphelins pour que le Roi puisse les aider. Mais il est impossible de continuer une dépense inutile puisque il ne reste "aucun espoir de les voir tourner à l'accroissement de la population des provinces du Centre du Royaume où on les destinait ni aux progrès de l'agriculture de ces mêmes provinces" (= cause des secours).
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Paris, 31 août [1776, rajouté au crayon].
" Sur vos représentations, Monsieur, et celles de M. de la Bove, intendant de Bretagne, j'ai pris les ordres du Roi à l'occasion des familles acadiennes répandues dans les villes maritimes et nommément de celles qui n'ayant pas voulu profiter de l'établissement ordonné pour elles en Poitou, ont demandé à sortir de cette province et d'être transportées à Nantes. Quoique leur émigration volontaire du Poitou semble devoir soulager M. de Blossac et vous des soins que vous preniez de ce peuple lorsqu'il était sous vos yeux, il est cependant nécessaire que vous restiez encore chargé de l'exécution des ordres du Roi à leur égard. Sa ville de Nantes étant aussi à portée de vous que M. de la Bove, qui se trouve lui-même chargé d'un grand nombre de ces familles placées à l'extrémité de la Bretagne, et qui exigent ses soins, Sa Majesté dont l'intention était d'attacher à son Royaume les familles qu'elle avait fait passer en Poitou où elle leur procurait non seulement des propriétés mais même tous les secours nécessaires pour en faciliter et en assurer les défrichements et la culture, a vu avec autant de surprise que de mécontentement le peu d'empressement et même la répugnance que la plupart ont fait paraître pour profiter de cette grâce, dont l'objet était d'assurer leur bonheur en faisant aussi le bien de l'Etat. Mais le peu de zèle qu'ils ont montré pour le travail, l'esprit de cabale manifesté par leurs députations et leurs plaintes aussi souvent réitérées que mal fondées sur la qualité des terrains, et enfin l'abandon qu'ils ont fait des habitations où déjà plus de 30 familles étaient logées depuis un an, et où plus de 60 autres étaient sur le point d'être placées, lui prouve combien ce peuple est peu disposé à se fixer dans le Royaume et à se livrer aux pénibles travaux d'agriculture : ce qui l'a déterminé à se faire rendre compte des diverses professions qu'exercent ordinairement les chefs de famille qui ont composé les différents convois envoyés de Châtellerault à Nantes, et voulant fixer l'espèce et le terme des secours qu'elle juge à propos de leur accorder, et que son intention est de proportionner au plus ou moins de facilité que certaines professions peuvent avoir à trouver du travail dans les ports de mer, ainsi qu'en raison de la conduite qu'un grand nombre ont tenu, elle m'ordonne de vous prévenir de ses volontés relativement à la distribution des fonds qu'elle veut bien faire délivrer au trésor royal pour ces mêmes familles.
Vous ferez donc payer aux trois premiers convois envoyés à Nantes avant le 1er janvier dernier tout ce qu'il leur est dû de solde jusqu'au dit jour 1er janvier, à raison de 6 sols par jour, mais je dois vous observer qu'en conséquence des ordres ci-devant adressés à M. de la Baume et qu'il vous communiquera, il y a quelques familles auxquelles le Roi a décidé que la solde serait supprimée du jour de leur arrivée à Nantes.
A l'égard de la solde depuis le 31 décembre dernier, les premiers et seconds convois n'étant presque composés que de navigateurs cesseront à cette époque d'y avoir part ; ils sont plus à portée que d'autres de gagner leur vie dans une ville maritime et d'ailleurs il ne parait pas qu'ils se soient conformés aux ordres adressés à M. de Blossac le 27 septembre dernier [1776-09-27 ; pas retrouvée] qui leur annonçaient la suppression de tous secours au 1er janvier, si avant ce temps ils ne s'étaient présentés devant le subdélégué de Nantes pour y faire la déclaration que Sa Majesté leur prescrivait. Si cependant vous jugez nécessaire de leur faire délivrer par forme de charité une somme de 9 # par individu, elle veut bien vous y autoriser, mais ils ne doivent plus s'attendre à recevoir d'autres secours de sa part.
Son intention est que le troisième convoi à commencer du 1er janvier dernier, jusque et compris le 30 juin, soit payé à raison de 2 sols par jour, passé lequel temps ceux qui le composent ne doivent plus s'attendre à d'autres secours étant de profession qui ne doivent pas manquer d'ouvrages dans un port de mer.
Le quatrième convoi arrivé à Nantes en plusieurs divisions, parti de Châtellerault dans les mois de mars et d'avril dernier, n'étant composé que de familles agricoles qui ont moins de facilité que les autres à trouver du travail au bord de la mer, vous les ferez payer du jour de leur arrivée à Nantes jusqu'au premier juillet à raison de 3s par jour et du 1er juillet ils commenceront à n'être payés qu'à raison de 2s seulement, sans qu'ils puissent espérer de secours plus considérables jusqu'au moment où ils pourront être établis.
Dans le cas où sur l'état des trois premiers convois il se trouverait quelques familles adonnées à l'agriculture et qui ne fussent pas du nombre de celles qui ont abandonné les maisons, dont elles jouissaient en Poitou, sa Majesté permet qu'elles soient jointes à l'Etat du quatrième convoi et profitent du même traitement qu'elle juge à propos de lui fixer.
Vous voudrez bien, Monsieur, me faire passer l'état des vieillards infirmes et dénués de parents dont le travail puissent les aider, ainsi que des orphelins en bas âge auxquels le Roi pourrait se prêter à continuer encore des secours dont les autres peuvent se passer. Mais l'état des finances ne permet pas de laisser subsister plus longtemps une dépense d'autant plus inutile que l'éloignement des Acadiens pour tout établissement en France n'offre aucun espoir de les voir tourner à l'accroissement de la population des provinces du Centre du Royaume où on les destinait ni aux progrès de l'agriculture de ces mêmes provinces qui étaient cependant les objets intéressants qui avaient motivés jusqu'à présent les dépenses considérables qui ont été faites.
Je suis très parfaitement, etc... [non signé, il s'agit d'une minute puisque elle comprend plusieurs ratures]
Notes
DSCN3613.JPG
// Martin, p. 223
Martin considère en tout cas que cette lettre vient bien du C.G.
// En marge, de la main de Pérusse : Minute de la lettre écrite (?) à M. le Marquis de Pérusse Descars. La lettre n'est pas signée, je ne sais pas qui l'a écrite : s'agit-il d'un nouveau brouillon de lettre que Pérusse s'auto-écrit ? Il y est fait mention de suspension de la paye pour les familles de marins mais pas pour les familles agricoles qui sont à Nantes ; en même temps, c'est peu probable que cette lettre ne soit pas écrite par le C.G. mais quand même... elle semble un peu trop favorable à Pérusse. Comme l'auteur n'est pas certain, l'interprétation de ce texte est fort difficile. Une lettre du 1777-01-00 (fiche @ 001728) fait penser que cette lettre a été vraiment envoyée à Pérusse par le C.G. puique Pérusse écrit (il parle de lui à la troisième personne): "[Pérusse] sait ce qui est dû de solde à ceux qui sont à Nantes ayant été chargé de tous les détails concernant les Acadiens dont il s'est essentiellement occupé depuis 4 ans"
autre point qui renforce l'idée que le C.G. est bien l'auteur de ce mémoire, cf. lettre précédente : @ 001475
Mots-clés
// secours : raisons : accroissement de la population et progrès de l'agriculture.
// populationnisme
// secours : nouvelles modalités : 2 sous
// perception : vaches à lait
// Poitou
// intégration : refus de
Numéro de document
001814