Document : 1785-04-19a
Références / localisation du document
MAE Correspondance Politique Espagne vol. 616 folio 403
Date(s)
1785-04-19a
Auteur ou organisme producteur
Calonne (Contrôleur général)
Destinataire
Comte de Vergennes, ministre des affaires étrangères
Résumé et contenu
A propos des mariages mixtes : Calonne suggère de laisser partir les Françaises mariés à des Acadiens (pas de problème) mais aussi les Français mariés avec des Acadiennes (donne plusieurs raisons intéressantes).
A bien reçu les mémoires de couples mixtes (français / acadiens) pour le passage à la Louisiane. Pour les Acadiens mariés avec des Françaises : pas de problème, peuvent passer avec elles. En ce qui concerne les Français mariés à des Acadiennes : " le principe général (?) interdit les émigrations des sujets du roi [dans des colonies étrangères] ". Mais ici, petit nombre d'habitants ; gens âgés, peu en état d'être utiles ; " Il est à présumer d'ailleurs que les Français qui ont contracté des mariages avec des Acadiennes sont de pauvres gens sans état ni propriété qui ne vivent que du produit réuni de leur travail, avec celui des familles dans lesquelles ils sont entrés et qui seraient peut-être sans ressource s'ils se trouvaient abandonnés seuls à leurs propres forces ". De plus, certains familles acadiennes n'ont pu survivre qu'en donnant leurs filles à des Français et dépendent d'eux, même en Louisiane (sans doute pour les personnes âgées qui ne peuvent pas vivre seules). Si interdiction de passer en Louisiane, ces familles devraient rester en France isolées.
Donc, préconise qu'on passe outre le principe général et qu'on les laisse partir ; cependant lui laisse prendre la décision finale et suggère de confier à l'intendant de Bretagne le soin de contrôler attentivement qui est vraiment marié avec un ou une acadienne.
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Paris 19 avril 1785
Vous avez bien voulu me faire passer quelques mémoires d'Acadiens mariés à des françaises qui demandent la permission de mener leurs femmes à la Louisiane et de Français mariés à des acadiennes qui sollicitent celle d'y passer avec les acadiens. J'ai reçu aussi plusieurs de ces mémoires directement qui m'ont été recommandés par Madame le duchesse de Rohan.
Je présume, qu'il n'y a pas de difficulté à permettre aux acadiens qui ont épousé des française de s'embarquer avec leurs femmes, pour passer en Amérique s'ils le jugent à propos. A l'égard des français mariés à des acadiennes, le principe général qui interdit les émigrations des sujets du roi s'opposerait à ce qu'ils s'expatriassent, pour passer dans des colonies étrangères s'il s'agissait d'un nombre considérable d'habitants. mais dans la circonstance présente il n'est question que d'environ 50 ou 50 individus dont presque tous les chefs sont âgés et peu en état d'être utiles au gouvernement. Il est à présumer d'ailleurs que les Français qui ont contracté des mariages avec des Acadiennes sont de pauvres gens sans état ni propriété, qui ne vivent que du produit réuni de leur travail, avec celui des familles dans lesquelles ils sont entrés et qui seraient peut-être sans ressource s'ils se trouvaient abandonnés seuls à leurs propres forces. Une considération qui est encore en leur faveur c'est qu'il est arrivé que des familles acadiennes privées de leurs chefs n'ont pu se soutenir qu'en donnant leurs filles à des Français sans le secours desquels elles ne pourraient aller à la Louisiane. Ces familles seraient par conséquent obligées de rester, isolées en France, et d'y vivre dans la plus parfaite misère.
Ces observations me portent à croire que par grâce spéciale et sans tirer à conséquence il serait possible de s'écarter du principe général qui s'oppose aux émigrations en faveur des particuliers qui demandent à suivre les Acadiens à la Louisiane ; au surplus, je soumets mes réflexions à votre prudence et je m'en rapporte entièrement à ce que vous jugerez à propos de faire à cet égard. Dans le cas où vous vous déterminerez à prendre les ordres du roi, sur la demande de ces particuliers je crois qu'il serait convenable d'adresser la permission qu'ils sollicitent à M. l'intendant de Bretagne et de charger ce magistrat de n'en faire absolument usage qu'en faveur de ceux qui justifieront être mariés à des Acadiennes.
J'ai l'honneur de vous adresser les placets qui m'ont été présentés par eux, et celui d'être avec un très sincère attachement, etc...
de Calonne
[suivent plusieurs pétitions d'Acadiens, très intéressantes]
Mots-clés
// nouveau(2005-01)
// protecteurs : duchesse de Rohan
// mariages
Numéro de document
002025