Document : 1773-08-06
Références / localisation du document
BM Bordeaux, MS 1480, f°430-432 // cf° 228-229
Date(s)
1773-08-06
Auteur ou organisme producteur
Lemoyne
Destinataire
Carvillon, secrétaire du C.G.
Résumé et contenu
Lemoyne au secrétaire du C.G. Il ne faudra pas trop imposer les Acadiens dans le Poitou ni ceux qui resteront sur place. Les Acadiens sont déjà victimes des communautés dans lesquels ils résident.
L. aimerait une réponse du C.G. avant le retour prochain des Acadiens de la seconde visite. Le "vertige" des Acadiens s'estompe. Nouvelles informations positives de Pérusse ont fait effet.
A propos de la partie législative, du ressort du C.G., il ne faudra pas trop imposer les Acadiens. Si les terres sont vides, c'est parce que les impositions sont trop importantes. "On ne peut présumer du terrain de Monthoiron excellent. Je le crois susceptible de culture, mais médiocre. Il ne faut donc pas la charger des mêmes redevances que s'il était réelement bon". Ce n'est pas l'intérêt de Pérusse d'exiger trop.
Revient aussi sur le mémoire de GrandClos Mêlé à propos des scellés : "On n'a pas fait droit à ce mémoire, à cause des arrangements actuels, mais ces gens là établis, les objets sur lesquels ils tombent renaîtront." Le problème resurgira dans le Poitou. Il faut le régler.
Il faudra réflechir aussi aux retards éventuels de paiement de la redevance : la dureté excessive à BIM ont "ruiné l'établissement acadien".
En ce qui concerne les Acadiens qui resteront : "Soyez assuré, M., qu'ils deviendront la victime des communautés dans lesquelles ils résideront, si on n'y pourvoit, ils seront écrasés d'impositions, de capitation, de taille, de corvées, etc. etc. . J'en ai ici des preuves. On a déjà tenté de les imposer à la capitation, on les force aux corvées, on les menace tous les jours, les graces qu'ils ont reçu les fait jalouser ; vous n'ignorez pas qu'un étranger qui s'établit dans un village quelconque, s'il n'est pas appuyé, devient la victime de la communauté. On peut, M. induire des privilèges qui ont été accordés aux étrangers qui ont fait des entreprises de défrichement et de dessechement, et qui pour cette raison sont venus s'établir en France ceux que l'on peut accorder aux Acadiens qui ne seront point établis. Ils méritent d'autant plus ces grâces qu'ils sont moins favorisés du gouvernement.
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M. [Destousches, barré, remplacé par :] Carvillon, Secrétaire de M. le C.G.
Saint-Malo le 6 août 1773
J'attends, M., une réponse de M. le S.G. Je voudrais bien la recevoir avant le retour des Acadiens que j'ai suivant le désir de M. de Pérusse envoyé visiter de nouveau les terres qui sont destinées à ce peuple. Je les attends de retour mercredi. Pendant leur absence beaucoup m'ont sollicité on fait leur réflexions et se sont présentés et les manoeuvres de ceux qui ont mis le trouble sont connus. L'esprit de vertige qu'ils avaient répandu cesse : M. de Pérusse m'a marqué avoir trouvé la marne fort abondante et à peu de profondeur dans les terrains à bâtir. J'en ai instruit, cela fit le meilleur effet. Il me marque aussi qu'il a retranché de la redevance [etc... résumé de la lettre de Pérusse].
Si vous prenez, M. des intérêts à la chose, vous devez être occupé de la partie législative. Tous les points qui auront rapport aux charges du colon méritent toute votre attention. Il est fait certain que toutes les terres bonnes dont la culture a été abandonnée n'ont été laissée que parce que les charges emportaient les bénéfices que le colon devait faire. Si en les reprenant on ne réduit pas les charges, elles le feront de nouveau. On ne peut présumer du terrain de Monthoiron excellent. Je le crois susceptible de culture, mais médiocre. Il ne faut donc pas la charger des mêmes redevances que s'il était réelement bon. Il n'est point je crois d'intérêt réel de M. de Pérusse d'exiger trop. Il l'est au contraire d'exiger peu, et d'assurer pour la postérité un revenu immuable, ainsi on pourrait mettre la quantité de grain qu'il demande rachetable, à la volonté du colon de la somme de ..., cette réserve accorde les deux parties intéressées.
Ce qui regarde le judiciaire mérite encore bien de l'attention. Vous pouvez vous remettre sous les yeux, M., un mémoire donné par M. L'abbé de Grandclos Meslé pour les Acadiens. Vous l'avez, vous y verrez que dans la pauvreté où sont ces gens là, les formalités absorbent le peu qu'un chef de famille peut hériter (?) [...] On n'a pas fait droit à ce mémoire, à cause des arrangements actuels, mais ces gens là établis, les objets sur lesquels ils tombent renaîtront. Si on n'y remédie d'avance quelque favorablement que soi disposé le gouvernement, il faut prévoir et quoique l'on doive espérer toute faveur, les discussions n'étant pas prévues, l'intérêt est terrible patitum miser (?).
Il y a encore un point bien essentiel à traiter, ce sera l'étendue et la rigueur des poursuites en cas de retard de payer les redevances. La dureté avec laquelle on en a agit à BIM pendant trois très mauvaises années successives, ont ruiné plusieurs établissements acadiens. Je rendrai compte de cet objet lorsque j'en serai plus informé à Lorient. Non seulement, M. il est nécessaire de prévoir pour ceux qui seront établis, il le faut aussi pour ceux qui resteront dans les villes de l'intérieur du Royaume et sur les côtes.
Soyez assuré, M., qu'ils deviendront la victime des communautés dans lesquelles ils résideront, si on n'y pourvoit, ils seront écrasés d'impositions, de capitation, de taille, de corvées, etc. etc. . J'en ai ici des preuves. On a déjà tenté de les imposer à la capitation, on les force aux corvées, on les menace tous les jours, les graces qu'ils ont reçu les fait jalouser ; vous n'ignorez pas qu'un étranger qui s'établit dans un village quelconque, s'il n'est pas appuyé, devient la victime de la communauté. On peut, M. induire des privilèges qui ont été accordés aux étrangers qui ont fait des entreprises de défrichement et de dessechement, et qui pour cette raison sont venus s'établir en France ceux que l'on peut accorder aux Acadiens qui ne seront point établis. Ils méritent d'autant plus ces grâces qu'ils sont moins favorisés du gouvernement.
J'ai cru, M., vous devoir ces réflexions que je vous serai obligé de communiquer à M. Destouches.
J'ai l'honneur d'être, etc.
Notes
Lemoyne écrit : "On ne peut présumer du terrain de Monthoiron excellent. Je le crois susceptible de culture, mais médiocre. Il ne faut donc pas la charger des mêmes redevances que s'il était réelement bon" [or ceci contredit le PV de la seconde visite des Acadiens dans le Poitou ; Lemoyne sait que les terrains ne sont pas très bons, mais il ne le dit pas ouvertement aux Acadiens ; je crois même qu'il dit le contraire]
Mots-clés
// acadiens victimes de la communauté
// perception : étrangers
// hostilité
// Acadiens = étrangers
// BIM
// stratégie de survie (SDS)
Numéro de document
000260