Document : 1796-10-25b
Références / localisation du document
AN, Série, C 495, Carton 323 : Pièces annexées 2 (ci-dessus C 495 / 320)
Date(s)
1796-10-25b
Résumé et contenu
25 octobre 1796 : Rapport du ministre de l'Intérieur au Directoire (Pièce annexée 2)
Rapport présenté au Directoire exécutif par le Ministre de l'Intérieur, le 4 Brumaire an 5e (25 octobre 1796)
Le ministre de la marine m'a transmis le message du conseil des Cinq Cents en date du 28 thermidor dernier [15 août 1796] que vous aviez adressé et dont l'objet est d'obtenir des renseignements sur le mode d'après lequel les secours accordés aux réfugiés et déportés des colonies françaises ont été payés depuis l'installation du corps législatif et des observations sur l'augmentation de ces secours réclamée par plusieurs de ces réfugiés. Il m'a fait passer en même temps votre lettre du 29 du dit mois qui accompagnait ce message et par laquelle vous l'invitez à vous mettre à portée d'y répondre. Je satisfais avec d'autant plus d'empressement à cette invitation que depuis longtemps la nécessité d'offrir à cette classe d'infortunés une ressource efficace contre la misère, sollicite, autant que l'ordre et l'économie, un changement dans cette partie de la bienfaisance nationale. Les observations et les vues que j'ai à vous présenter à cet égard, ne s'appliqueront pas seulement aux réfugiés et déportés des colonies françaises, mais aussi aux autres classes de réfugiés qui ont éprouvé les mêmes malheurs et qui les lois ont associé aux mêmes avantages, tels que les propriétaires colons domiciliés en France à l'époque des désastre des colonies et qui depuis cette époque n'en reçoivent aucun revenu ; les Corses réfugiés dans le continent, les réfugiés en Mayenne depuis la reprise de cette ville par l'ennemi, et les Irlandais résidant en France avant la révolution et qui par l'aliénation des biens ci-devant affectés à leur établissement [?] sont privés de toute ressources.
A l'époque de l'établissement du nouveau régime constitutionnel, les diverses classes de réfugiés jouissaient d'un secours par mois fixé par la loi du 27 Vendémiaire [voir ci-dessus, p.85] an 3ème. Savoir : à 90" (livres) pour les réfugiées sexagénaires ; à 75 livres pour ceux au dessous de 60 ans ; à 50 " pour les femmes et pour les enfants au dessus de 12 ans, et à 25 " pour ceux au dessous de cet âge. Ce secours avait été doublé en raison du discrédit des assignats par un décret du 25 fructidor an 3e et par un arrêt du comité de salut public du 11 Brumaire an 4e rendus en faveur des réfugiés de Corse et de ceux des colonies seulement. Mais malgré cette augmentation dont n'ont pas joui les autres classes de réfugiés, le secours dont il s'agit n'en fut pas moins illusoire pour tous, puisqu'il était alors acquitté en assignats valeur nominale. Le mode de payement a continué d'être suivi jusqu'au 1er Germinal dernier, époque depuis laquelle toutes les dépenses publiques ont du être payées en mandats. [?] La Loi du 17 Floréal suivant ordonne que les secours accordés aux réfugiés seraient réduits à leur proportion primitive déterminée par la loi du 27 Vendémiaire an 3e et payés en valeur fixe tant pour l'arriéré que pour le courant. Cette déposition avait paru devoir améliorer efficacement le sort des réfugiés, mais le discrédit subit et considérable qu'a éprouvé le nouveau papier monnaie a encore trompé leur attente et jusqu'à présent rendu presque nulle
Je pense que pour rendre efficace et indépendant des circonstances les secours à distribuer aux réfugiés, il importe de les faire acquitter en valeur métallique ; mais il me paraît aussi indispensable de diminuer les proportions de ces secours fixés par la loi du 27 Vendémiaire. Cette diminution, en égard à ce que les secours dont il s'agit sont purement alimentaires, et qu'ils doivent dès lors être bornés au strict nécessaire, me paraît devoir être à peu près de moitié. En améliorant par l'effet de cette mesure la situation des réfugiés, il serait important d'empêcher les abus qui jusqu'à présent ont eu lieu dans la distribution de ces sortes de secours par le silence des lois sur les moyens de les prévenir. Il faudrait à cet effet exclure des secours dont il s'agit tous les réfugiés exerçant un commerce ou un emploi civil ou militaire, ou ayant un revenu quelconque suffisant pour subsister. Ce but difficile à atteindre, pourrait cependant être rempli en exigeant de chaque réclamant un certificat d'indigence de l'administration municipale dans l'arrondissement dans lequel il réside, délivré, non sur l'attestation de témoins, mais d'après les informations prises sur les lieux par les membres de la municipalité. Cette formalité pourrait être exigée tous les six mois afin d'éviter les surprises de la cupidité et de la mauvaise foi.
Il serait encore convenable de conserver les dispositions de la loi du 27 Vendémiaire de l'an 3e et d'après lesquelles les réfugiés qui refuseraient de travailler quoiqu'on leur ait offert l'occasion doivent être privés de tous secours et ceux qui travaillent de leur état ou profession ne doivent recevoir que le tiers des secours fixés; mais en conséquence des observations précédentes relatives aux réfugiées exerçant un commerce ou un emploi civil ou militaire, il serait nécessaire de restreindre l'application de cette dernière disposition à l'égard de ceux des réfugiés exerçant un métier ou une profession mécanique qui prouveraient par la production du certificat mentionné ci-dessus l'insuffisance du produit de leur travail pour leur subsistance et celle de leurs familles. Le but de ces mesures est de rendre profitable au trésor public le travail des uns et l'oisiveté même des autres en le déchargeant d'une dépense superflue dans les deux cas. Une autre économie qu'il importerait d'opérer dans la dépense dont il s'agit serait de supprimer l'indemnité de 150" accordée par un article additionnel à la loi du 27 Vendémiaire à chaque réfugié, et qui doit lui être payé lorsque son droit aux secours est constaté et reconnu. Cette indemnité est allouée à titre de provisoire, et il me paraît d'autant plus convenable d'en faire cesser le payement qu'elle produit un double emploi, en ce que les secours journaliers peuvent aussi être considérés avec raison comme une indemnité provisoire.
Je ne dois pas oublier de faire mention d'une réduction que déjà les circonstances m'ont permis d'opérer dans cette dépense et qui résulte de la cessation des secours accordés aux réfugiés des départements de l'Ouest. L'entière pacification de ces contrées ayant permis à ces réfugiés de rentrer dans leurs foyers, j'ai donné les ordres nécessaires pour que tout payement de cette nature cessât pour les citoyens à compter du 1er Vendémiaire dernier. Je ne puis déterminer d'une manière précise le montant de la dépense qui resterait encore à la charge du trésor public au moyen des diverses réductions et suppressions dont il vient d'être parlé, et en conséquence de la nouvelle fixation de secours proposée, mais par aperçu je crois pouvoir assurer que cette dépense ne s'élèvera pas à un million par an en valeur métallique, tandis qu'en conservant dans leur intégralité les dépositions de la loi du 27 vendémiaire se trouverait portée à environ 5 millions par année.
Je crois devoir vous présenter ici le résumé des propositions que je viens de vous faire afin que vous mettre à portée d'en saisir facilement l'ensemble. J'y ajouterai quelque dispositions particulières tendant à assurer l'ordre et la régularité de la répartition du secours dont il est question et qui ne peuvent être séparés des mesures principales déjà proposées.
1er : Rapporter les dispositions de la loi du 27 Vendémiaire an 3e relative aux proportions de secours accordés aux réfugiés et déportés des colonies françaises, aux corses, aux mayençais réfugiés et aux Irlandais, ainsi qu'à tous les autres individus désignés par la dite loi pour participer et ordonner que les secours seront fixés de nouveau en valeur métallique à compter du 1er Vendémiaire an 5e (?) ; savoir : pour les citoyens âgés de plus de 60 ans, etc? [?]
2e : ordonner que les individus qui jouissent des secours fixés par la loi du 27 Vendémiaire ne pourront participer aux nouvelles proportions de ces secours qu'en produisant un certificat d'indigence délivré par l'administration municipale de son arrondissement d'après les informations prises sur la situation et les moyens d'existence du réclamant. Prescrire le renouvellement de cette formalité tous les dix mois.
Etc? (résumé)
Telles sont, citoyens directeurs, les vues que j'ai cru devoir vous présenter pour vous mettre à portée de satisfaire à l'objet du message du Conseil des 500 en date du 28 Thermidor dernier. Je devais, à cet effet, vous offrir les moyens de concilier les droits sacrés de la justice et de l'humanité, que la classe malheureuse des réfugiées et déportés est si bien fondée réclamer, avec les principes d'ordre et d'économie sévère qui doivent être appliqués à toutes les parties de la dépense publique. Je crois avoir rempli ce but important : je soumets mes propositions à votre examen et vous invite à vous occuper de leur objet le plus promptement possible.
Signature.
Notes
extrait de premiers chapitres
Pièce annexée aux résolutions (C 495 / 320) : - celle du 13 Frimaire sur le mode de payement des secours accordés aux réfugiés et déportés de la Corse, des colonies françaises, etc. :
Numéro de document
000445