Document : 1792-09-01
Références / localisation du document
AN, section moderne, F15 3494 - dossier Gironde
Date(s)
1792-09-01
Auteur ou organisme producteur
Les administrateurs composant le directoire du département de la Gironde
Destinataire
commission de secours publics de l'Assemblée nationale
Résumé et contenu
Lettre très intéressante qui aborde de nouveaux problèmes d'interprétation pour la loi de 1791.
Différences d'interprétation entre différentes autorités administratives, notamment entre les municipalités et le district qui semble être plus généreux et moins méfiant que les municipalités : "Le district de Libourne paraît douter que la veuve Deroyer et ses deux belles filles, marie et autre Marie Deroyer, soient originaires de l'Acadie" ; quant à la municipalité de Bordeaux, elle prétend que les enfants d'une Canadienne ne doivent pas toucher les secours. Questions de savoir si les enfants nés en France doivent toucher les secours. Le district raisonne logiquement en disant qu'il n'y pas d'enfants de moins de 20 ans nés en Acadie puisque la paix date de 1763.
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Département de la Gironde. Comité des Secours Publics.
Bordeaux le 1er Septembre 1792 4e de la Liberté et de l'Egalité.
Lettre du directoire du département de la Gironde sur des demandes de plusieurs familles Acadiennes.
Messieurs
[en marge : renvoyé au ministre de l'intérieur par le comité des secours publics de la convention nationale, le 20 oct. 1792 l'an premier de la République française]
Plusieurs acadiennes et canadiennes qui résident dans ce département se sont présentées devant les municipalités des lieux de leur domicile pour demander à être comprises ainsi que leurs enfants, dans l'état qui devait être rédigé en exécution de l'article 4e de la loi du 25 fev. des habitants de l'A. et du C. qui sont dans le cas de jouir des secours mentionnés en l'article 2 de la même loi. Nous joindrons ici les pétitions qu'elles ont présentées, les observations des municipalités des lieux de leur domicile et l'avis des directeurs du district de Bordeaux, Bourg et Libourne. Le district de Libourne paraît douter que la veuve Deroyer et ses deux belles filles, marie et autre Marie Deroyer, soient originaires de l'Acadie ; il est vrai qu'elles n'ont pu apporter d'autres preuves que le certificat ci-joint par lequel le missionnaire de Beaubassin en Acadie attestait l bonne conduite de Pierre Deroyer leur mari et père, et le certificat d'impartition [?] de la bénédiction nuptiale du dit Pierre Déroyer. Mais nous pouvons attester, Messieurs, que ces trois femmes étaient du nombre de celles qui recevaient comme acadiennes sur les ordres du ci-devant intendant des secours, donc nous leur faisons continuer le payement jusqu'à ce qu'il ait été définitivement statué sur leur sort.
Comme il n'y avait que les Acadiens qui fussent payés à l'intendance, la Veuve Tondeur [?], qui est Canadienne, ne pouvait pas être comprise dans l'état que nous avons trouvé parmi les papiers de cette administration ; il ne paraît pas même qu'elle ait jamais reçu aucun secours du gouvernement. Cependant, la municipalité de Bordeaux pense qu'elle est dans le cas de la loi du 25 fev. et qu'elle doit jouir de la solde accordée par l'art. 2 aux habitants de l'Acadie et du Canada : mais que ses enfants doivent en être exclus parce qu'ils sont nés en France. Le directoire du district est d'avis que la solde doit être accordée non seulement à la veuve Tondeur, mais même à ses enfants.
Nous croyons, Messieurs, devoir nous référer aux détails dans lesquels le district et la municipalité sont entrés relativement à la veuve Tondeur et à ses enfants. Nous observerons seulement que s'il est décidé, comme nous le présumons, que cette veuve est susceptible d'obtenir ce secours il n'y aurait aucun motif de le refuser à ses enfants, parce que la loi n'exclut point ceux qui sont nés en France, que c'est à ceux là au contraire que le secours est accordé, puisqu'ils ne doivent en jouir que jusqu'à l'âge de 20 ans, or les enfants qui seraient passés avec leurs parents à la paix de 1763 auraient au moins 29 ans.
Les pétitionnaires sont, Messieurs, des veuves et des orphelins, les premiers sont mêmes, du moins pour la plupart, dans un âge avancé qui ne leur permet pas de se procurer aucune ressource par le travail et en général leur position est très gênée. Ils ne sont réduits à ces états que parce que leur dévouement pour la France les a portés, ainsi que leurs maris et pères, à abandonner leur patrie et leurs propriétés pour suivre le sort de nos armes [ou armées] ; et ce motif qui a déterminé l'assemblée constituante à s'occuper de leur sort est bien fait pour légitimer le désir que nous avons de voir accélérer la décision que nous avons l'honneur de vous demander dans leur intérêt.
Mots-clés
différences d'interprétation district -municipalités //
Numéro de document
000605