Document : 1767-06-05 // 1767-07-18
Références / localisation du document
ANC, MG6 C3 [microfilm 12881, troisième registre, p. 8] // Archives du port de Cherbourg (minute des lettres adressées par le commissaire des classes à Cherbourg, Defrancy, du 1er mars 1763 au 2 avril 1768)
Date(s)
1767-06-05 // 1767-07-18
Auteur ou organisme producteur
De la Rue de Francy, commissaire des classes à Cherbourg
Destinataire
Mistral, commissaire général de marine, ordonnateur au Havre
Résumé et contenu
Tentative de convaincre les Acadiens de se mettre à la culture. Difficile de les placer tous dans un canton. Réticence à cultiver.
Quoiqu'il ait tenté pour convaincre les Acadiens qu'on leur faisait une faveur en leur distribuant des terres. Ils n'acceptent qu'à condition que ce soit extrêmement près de Cherbourg. Il y a bien quelques fôrets du Roi qui ne produisent aucun rendement, mais cette forêt ne pourrait les contenir tous. Ce serait bien pour eux et leur descendants de les réunir tous dans un même canton (pas d'explication). Pas d'émulation pour le travail, se contentent de la solde, paresse, etc... Ne se préoccupent pas de leurs enfants. "il n'y a qu'une seule famille, les Broussards, qui sont bien déterminés à prendre de la terre dans quelque canton qu'on veuille la leur donner et à la faire valoir".
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1767, 5 juin
A M. Mistral, à Paris
Depuis le départ de M. Moreau, dont j'ai eu l'honneur de vous informer le 29 du mois passé, j'ai épuisé ma réthorique pour prouver à mes Acadiens en état de faire encore quelque chose que ce serait pour eux et pour leurs descendants un bien grand avantage que les terres qu'on voulait leur donner, je n'ai pu les déterminer à accepter ces propositions qu'aux conditions que ce sera aux environs et très proches de Cherbourg, quelque peu qu'on les en éloigne décidément ils n'en veulent pas. Il y a bien en effet aux environs d'ici quelques landes et une très grande partie de la forêt du Roi dite la foret de Valognes, où par la connivence et malversation des gardes il n'est revenu absolument aucun brin de bois ; mais quand bien même on se déciderait à leur céder tous ces terrains pour les mettre en terre labourable, je doute fort qu'ils y puissent contenir tous ou bien ils en auraient chacun une bien petite part. Quelques unes de mes familles nobles accepteraient aussi de ces mêmes terres aux mêmes conditions : en ce cas je penserais qu'ils mériteraient la préférence et qu'en les réunissant tous dans un même canton, on leur ferait tout le bien qu'on peut leur faire et plus avantageux pour l'avenir pour eux et pour leurs descendants que les pensions qu'on se propose de leur accorder.
Quelque chose que j'ai pu leur dire, je ne vois point chez les uns ni chez les autres cette émulation pour le travail et ce zèle pour le bien de l'Etat et le leur même, que je m'attendais y trouver dans ce moment décisif ; je ne remarque pourtant que de la paresse, de la cagnardise [CAGNARDISE. s. f. Fainéantise, paresse. Il est du style familier] et de l'indolence à laquelle ils se sont accoutumés tant, je crois, par leur naturel que par leur misère. Un peu de pêche du poisson frais, quelques journées qu'ils font dans les différents travaux du port ou chez des particuliers, produisent à ceux qui y peuvent vaquer quelque chose à ajouter à la paie du Roi, dont ils paraissent déterminés à se contenter si l'on voulait les éloigner d'ici. Quelques uns font le métier de matelot et gagnent un peu plus et assez pour se passer eux personnellement des secours du Roi, mais aucuns ne veulent regarder l'avenir et leurs enfants il n'y a qu'une seule famille, les Broussards, qui sont bien déterminés à prendre de la terre dans quelque canton qu'on veuille la leur donner et à la faire valoir, ils y sont en effet plus propres que les autres, y ayant toujours travaillé depuis qu'ils sont en France et ayant par là conservé et augmenté les connaissances qu'ils avaient comme les autres du métier de laboureur. Ils m'ont prié de les citer je le fais avec plaisir et vous prie même, si vous y pouvez quelque chose de contribuer à leur fort le sort le plus avantageux possible à cause de leur bonne volonté ; je fais part de ceci à M. Moreau [...]
1767- 18 Juillet
Il parait qu'on ne serait guère porté à donner des pensions à tous les nobles et leurs alliés ; il en est en effet à qui je crois on ferait plus de bien tant pour le présent que pour l'avenir et pour leurs enfants, de les forcer à prendre et à cultiver de ces terrains.
Mots-clés
// RED
// projet d'établissement
// glèbe
// travail
// perception : paresse, indolence, cagnardise
// Cherbourg
Numéro de document
001055