Document : 1774-01-15c // 1774-01-30
Références / localisation du document
ANC, MG6 A15, série C [microfilm F 849] // AD Calvados [Caen], C 1020
Date(s)
1774-01-15c // 1774-01-30
Auteur ou organisme producteur
de Francy, commissaire des classes de la marine
Destinataire
intendant // Entremont et Bellefontaine
Résumé et contenu
Demande de faveurs particulières pour les familles d'Entremont : on leur accorde 12 sous au lieu de 6.
Parmi les familles acadiennes, deux méritent des égards distingués : un comme chef de famille des d'Entremont, l'autre (Bellefontaine) par les services qu'il a rendu, tous les deux par la fortune qu'ils ont perdu et par leur grand âge et infirmités réelles. On leur a promis un sort particulier : les mettre dans une abbaye ou maison religieuse.
Ils trouvent que la décision tarde depuis la visite de Lemoyne en juin. Il leur fait passer deux mémoires rédigés par ces derniers. 1. Bellefontaine : il appuie sa demande, et espère qu'ils ne seront pas obligés d'aller dans une maison religieuse avec suspension de solde. Il préférent rester libres avec une solde de 12 sols.
2. D'Entremont, Charles : a dessein de lui faire passer son mémoire prochainement par Virandeville. Ne dit rien de plus, mais appuie sa demande.
Réponse le 30 janvier : on leur accorde 6 sous + 6 sous, puis 12 sous quand la solde sera supprimée (des états de paiement plus loin en atteste).
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A Cherbourg, le 15 janvier 1774
Vous êtes sans doute informé que dans le nombre des familles acadiennes réfugiées à Cherbourg, il en est deux, le Sieur Charles de Mius d'Entremont, sa femme et sa fille, et le Sieur Joseph Bellefontaine et sa femme, qui méritent des égards distingués ; l'un comme chef de la famille des d'Entremont, l'autre par les services qu'il a rendu, l'un et l'autre par la perte d'une fortune immense qu'ils ont sacrifié à leur fidélité, l'un et l'autre par leur grand âge et par des infirmités réelles qui les rendent absolument incapables d'aucun travail et par conséquent de se livrer à la culture des terres de M. de Pérusse en Poitou. Vous savez qu'on leur a promis un sort particulier et que pour cela on projette de les placer dans une abbaye ou maison religieuse où ils recevront la nourriture et le vêtement.
Dans la triste position où ils languissent ici il leur est bien naturel et de trouver que cette décision tarde beaucoup depuis le mois de juin dernier que M. Lemoyne leur en a donné les premières espérances ; il lui en ont renouvellé leur sollicitations ; il leur a conseillé de s'adresser à vous Monsieur comme celui qui pouvez le plus auprès de M. le C.G. et le plus à même de lui proposer les plus prompts moyens de parvenir à ce projet, et de vous adresser des mémoires détaillés qui vous fassent connaître ce qu'ils ont été, les sacrifices qu'ils ont faits, les pertes et les malheurs qu'ils ont essuyé, la position où ils sont actuellement et ce qu'ils demandent.
Le sieur Bellefontaine a fait rédiger celui ci joint et il me prie de vous le faire parvenir [cf. fiches précédentes]. Permettez que j'y joigne mes prières tant pour exciter votre compassion en sa faveur que pour vous solliciter de faire accellerer la décision de son sort le plus promptement et le plus avantageusement possible et de façon qu'il puisse en jouir et rester à Cherbourg. Il doit vous être aisé de sentir que le plus petit déplacement serait bien pénible à tous égards, pour deux personnes aussi âgées et aussi infirmes, et que les obliger d'aller demeurer dans une maison religieuse ne serait pas leur procurer tous les adoucissements dont ils ont besoin ; car la nourriture, le vêtement et les soins dans une maladie sérieuse ne sont pas tous les besoins de la vie ; il est bien d'autres petites dont ceux qui, sans être tout à fait malades, sont necessaires à la santé, qu'ils ne trouveront pas dans une maison où on les regarerait peut-être déjà comme un fardeau onéreux et qu'ils ne pourraient se procurer si ils n'ont la disposition de quelques sols. Or la pension que le Sieur Bellefontaine demande ici pour lui et pour sa femme, quelque modique qu'elle soit, en leur laissant l'agrément dans une vie libre dont ils ont toujours joui, les mettra à même de se procurer les soulagements dont ils auront besoin et tels qu'ils se les croiront utiles.
Voila le véritable adoucissements qu'ils demandent à leur misère, et cette liberté fera la bonheur qu'ils demandent. Je crois que les 12 sols nets par tête et par jours qu'ils sollicitent ou une pension équivalente ne paraitront pas une grâce exhorbitante. Au moins sentira t-on que ce n'est pas un dédomagement proportionné à la perte de sa fortune, ni à celle irréparable du massacre de sa famille, ni une récompense de ses services. Vous êtes sans doute touché des malheurs de ces honnête et respectable officier et de la triste situation où il est réduit ; trouver donc bon que je vous le recommande particulièrement ; je partagerai avec lui la reconnaissance du bien que vous lui procurerez.
Quant au sieur Charles d'Entremont, il m'a paru dans une dernière conversation que je viens d'avoir avec lui, qu'il a dessein de vous faire passer son mémoire par M. de Virandeville et qu'il a mis toute sa confiance en l'honneur de sa protection auprès de vous ; en effet, où en pouvait-il trouver une meilleure ? Je ne ferais donc que vous répéter tout ce qu'on vous en dira ; néanmoins permettez que j'y joigne aussi ma prière pour la justice que vous trouverez lui être due.
Je suis, etc... signé : De Francy
REPONSE
[en haut, indication : répondu le 30 janvier
effectivement, un peu plus loin
Caen, le 30 janvier 1774
M. L'intendant, touché des malheurs et de la triste situation des familles d'Entremont et de Bellefontaine et des représentations que vous lui avez faite à cette occasion, a bien voulu [mot ill.] à faire payer à ces deux familles [une somme de 6 sous - ce passage, déviné plutôt que lu] par jour et par tête outre les 6 sols qu'elles reçoivent du Roi à commencer du premier de ce mois, et 12 s. lorsque la solde [barré, remplacé par paye] du Roi sera supprimée.
[plus loin des états de paiement : 365 jours à 12 s = 219 livres / an [année 1775 à 77] et ils touchent, la même année, également la paie de 6 s / jour soit 109 l. 10 sols, avec les autres Acadiens ; en 1775, ils ne touchent la solde que sur 360 jours soit 216 livres + 108 livres
Mots-clés
// secours : 12 sous
// distinction
// Cherbourg
Numéro de document
001120