Document : 1774-03-23a
Références / localisation du document
RAPC 1905-II p. 220 // AN Col C 11 D 8 // ANC, MG1-C11D8 ou MG1 - 18 C11D8 (microfilm des originaux F 175, volume 8, p. 287 et suivantes du registre) // Emile Lauvrière, La Tragédie d?un Peuple. Histoire du peuple acadien de ses origines à nos jours, Paris, Henry Goulet, 1924 (1ère édition : Paris, Brossard, 1922). p. 228
Date(s)
1774-03-23a
Auteur ou organisme producteur
Lemoyne [très probablement]
Destinataire
ministre de la marine [très probablement]
Résumé et contenu
Mémoire sur le paiement de la solde des familles de l'île Royale et du Canada - dernière de la liste, une sauvagesse indemnisée...
une petite allusion au paiement "centralisé" de la solde à Rochefort = c'est parce que les familles de l'île Royale et Canada sont principalement dans le pays d'Aunis et que la centralisation permet de mieux contrôler les dépenses.
L'auteur dit qu'une distinction aussi rigoureuse que possible a été faite entre les habitants de l'île Royale / Louisbourg, etc... et les Acadiens (le texte ne traite que des premiers).
Parmi les habitants de l'AS, 3 classes : (en fait deux principales : 1. militaires et nobles ; 2. officiers d'administration [ces deux classes touchent des pensions jusque vers 18 et 20 ans) ; 3 : habitants (qui touchent subsistance de 6 sous par jour).
Détail des paiements effectués (et évolution de ceux-ci tant pour les officiers que pour les habitants) ; total : près de 100,000 livres annuels (réduits présentement à environ 50,000 livres - suppression de nombreux habitants de cette distribution de secours)
Réforme avait été ordonnée par une lettre du 16 février 1773 [non retrouvée]
Nombreux dossiers individuels en suite (mais uniquement de personnes de l'île Royale, Louisbourg - pas d'Acadiens). En revanche, de nombreux détails sur ces personnes ont été retranscrites ci-dessous.
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23 mars 1774
La perte de l'île Royale, de l'Acadie et du Canada dont les habitants sont retournés en France plutôt que de rester sous une domination étrangère avait déterminé le gouvernement à donner une subsistance à ces familles. Il s'est glissé beaucoup d'abus et ce n'est qu'avec peine qu'on a pu parvenir à les faire cesser.
Toutes les familles de l'Acadie ont été vérifiées, il en a été fait un rôle particulier remis à M. le C.G. qui à compter du premier juillet 1773 s'est chargé de pourvoir à leur subsistance.
Les familles de l'île Royale et du Canada sont divisées en trois classes.
La première est composée de militaires et nobles. La seconde, des officiers d'administration. La troisième, des habitants.
Il avait été accordé aux pères et mères des familles militaires, nobles ou vivant noblement, des pensions et un traitement aux enfants jusqu'à l'âge de 18 et 20 ans, aux habitants une subsistance de six sols par jour et de trois sols jusqu'à l'âge de 18 ans, le fonds fixé pour cet objet était primitivement de 54,200 l. Mais la mort de plusieurs et le passage de quelques autres à 18 et 20 ans ont réduit ce fonds. Savoir :
105 officiers d'épée : 22.900 livres
23 officiers d'administration : 4.900 livres
147 habitants : 17.718 livres
total : 45.518 livres
Le bénéfice de 8,682 livres
Indépendamment de ces traitements, il y avait encore 444 individus de tous métiers auxquels le Roi payait la subsistance et sur laquelle Monseigneur avait ordonné une réforme par sa dépêche du 13 février 1773 à compter du 1er avril de la même année, ces subsistances formaient un objet de 47,952 l.
Parmi les personnes dont la subsistance avait été supprimée, il s'en trouve qui sont absolument hors d'état de subsister et d'autres auxquelles on ne peut refuser de continuer le traitement jusqu'à 18 ans ; il en a été fait un examen rigoureux, Monseigneur verra par l'état ci après que le nombre en est réduit à 53 personnes qui ne coûteront que 4,322 l. Il y a donc un bénéfice de 43,630 l. Il résulte que les familles de l'île Royale suivant le premier arrangement coutaient :
pour les pensions : 54,200 l.
Pour les subsistances : 47,952 l.
Total : 102,152 l.
Elles ne coûtent présentement que :
pour les pensions : 45 518 l.
pour les subsistances : 4,320 l.
Total : 49,939 l.
Le bénéfice actuel est de 53,314 l.
Monseigneur, par sa dépêche du 16 février 1773, avait ordonné la première réforme à compter du 1er avril 1773, mais ce terme étant très court, et plusieurs ayant pris des avances chez les boulangers, on propose de ne faire commencer dans tous les ports la première réforme qu'à compter du 1er juillet 1773.
Les personnes qui se trouvent rayées du rôle par le présent arrangement seraient trop malheureuses si on faisait cesser sur le champs leur traitement, on propose de le leur conserver également jusqu'au premier juillet 1774, à cette époque il n'y aura plus que les personnes comprises dans le présent état.
La plus grande partie de ces familles étant dans le Pays d'Aunis, il conviendra de faire à l'avenir le fonds de 49,838 l. à Rochefort, sauf aux autres ports à s'entendre avec ce dernier pour l'acquittement de ce qui sera dû dans chacun.
[seul le début du document est retranscrit dans le RAPC 1905. Voici la suite, retranscrite depuis la série Col. C 11 D 8)
Cette réunion fera connaître plus facilement l'objet total.
On a distrait de ces Etats trois soldats qui sont dans le cas de la demie solde, savoir :
1. (en marge : Rochefort) le né Chabot, âgé de 65 ans, soldat infirme, il a servi pendant 28 ans à Québec, il avait été employé comme Canadien sur le rôle des subsistances mais il doit être rayé, et comme il ne doit pas rester sans récompense, on propose de lui accorder une demie solde de 9 livres par mois.
2. (en marge : Rochefort) Le né Pierre Girard, âgé de 58 ans, a servi pendant 22 ans à l'île Royale comme soldat ; on propose de le supprimer des traitements ainsi que sa femme et son enfant, et de lui accorder une demie solde de 9 sous par mois.
3. (en marge : Le Havre) Le né Greffin, âgé de 59 ans, a servi pendant 28 ans, et il est dans le cas d'avoir la demi solde : on propose de lui accorder 9 # par mois.
(en marge : Saint-Malo) : On a encore distrait la Dlle Pouilly. Cette fille est née à Louisbourg de parents honnêtes qui ont perdu tous leurs biens : elle a une vocation décidée pour le couvent des dames du Bon pasteur : elle avait demandé la continuation de sa subsistance pour lui servir de dot, mais cette continuation pouvant tirer à conséquence, Monseigneur a écrit le 3 février dernier à M. Guillot de pressentir les religieuses sur la dot à donner pour cette jeune personne. M. Guillot marque que la dot est de 1800 l. mais qu'il ne demande que 1500 # parce qu'il se procurera les 300 # restantes de personnes charitables, et il supplie Monseigneur d'avoir égard à la demande de la Dlle Pouilly. On propose en conséquence d'accorder à la Dlle Pouilly 1500 livres une fois payées.
suit un tableau comprenant les entrées suivantes : numéro, nom, âge, résidence, observations, décisions [toutes les décisions ont été approuvées à la fin, somme par année.
1. Basmeul, 73 ans, St Malo (résidence), demeure à St Briac. Cet homme était habitant de Gaspé. Il a été pris par les Anglais étant à la pêche ; il prétend avoir fait 18 campagnes, il est hors d'état de gagner sa vie, et ne possède rien. Décision : on propose de le conserver à 6 sols par jour. Somme par année : 108 livres
2. Dlle Boisjoly, épouse du Sieur Dasterel, 29 ans, La Rochelle
3. Etienne Dastorel son fils, 7 ans
4. Marie Anne Thérèse, 9 ans
attendu la misère de cette famille issue du Canada, le Sr Dastrel a été nommé il y a deux ans capitaine dans les troupes de l'île de France, mais il n'a pu donner aucun secours à sa famille. On propose d'employer cette famille, savoir, la mère à 6 s. / j., et 3 s. à chaque enfant pendant 1774 seulement ; d'en prévenir le Sr Dastrel afin qu'il s'arrange pour leur faire passer des secours ou si Mgr le juge plus à propos, d'ordonner une retenue sur ses appointements. [108 l + 54 + 54]
5. Busnel, veuve, 55 ans, St Malo, son mari a été blessé au siège de l'île Royale et est mort en France de la suite de ses blessures : elle même a été blessée au siège, et est dans la plus grande misère. Décision :
Les services de son mari la rendent susceptible de la subsistance. On propose de la lui conserver et de rayer sa fille. (108 l.)
6. Barré 80 ans
7. Le Manquet, sa femme, 65, le Havre
Cet homme est très infirme, il a très bien servi en Canada en qualité de capitaine de quartier et il mérite les grâces du Roi. Décision : attendu ses services et son grand âge, on propose d'accorder 6 s au mari et 3 sols à la femme. (108 + 54)
8. Cabouffy, veuve, 48 ans, St Malo. Elle est devenue folle de la perte de son mari tué au siège, elle est fort à charge à sa famille qui l'a fait renfermer ; elle n'a rien. décision : son état mérite des égards, on propose de lui accorder 3 sols par jour. (54 l.)
9. Clermont, 49 ans, Cherbourg : cet homme est natif du Labrador. Il est parent de M. Dangeac, et a perdu tout son bien. Décision : il parait juste d'avoir égard à sa parente : on propose de lui accorder le traitement des habitants de l'île Royale (108 l.)
10 - 15 : 6 enfants Cocheret de 4 à 14 ans, St Malo : le père de ces 6 enfants était marchand à l'île Royale et a perdu plus de 40,000 livres de marchandises pendant le siège. M. Guillot marque que cette famille est digne des grâces du Roi. Décision : on propose de leur accorder à chacun 3 s par jour jusqu'à l'âge de 18 ans.
16. Barbe Créon, 7 ans, Rochefort, son père, allemand, est mort à Cayenne, et cette orpheline est élevée à l'hôpital des orphelins avec les 6 s. de subsistance. Décision : attendu sa qualité d'étrangère, on propose de les lui continuer jusqu'à 18 ans. (108 l.)
17. Cécile Pinochet, veuve Darmet (?), 33 ans
18. Cécile Darmet, 16 ans
19 Elisabeth Darmet, 13 ans
La Rochelle. Leur père a été tué pendant le siège et cet évenement les rends susceptibles de secours. Décision : on propose de conserver le traitement de la mère pendant cinq ans et celui des deux filles jusqu'à 18 ans (108 livres X 3)
20. Françoise Tregui (?), 8 ans, La Rochelle ; sa mère était de Louisbourg et cette fille est dans le cas du traitement jusqu'à 18 ans ; les autres enfants, ayant atteint cet âge, sont rayés. Décision : on propose de conserver le traitement jusqu'à 18 ans. (108 l.)
21-25 : enfants du Bourdieu (de 3 à 9 ans, les garçons cités en premier, la fille en dernier)
La Rochelle. Leur père est dans un état d'infirmité qui mérite les bontés de Monseigneur. M. de Villehelier fait les plus vives instances pour la conservation de ces secours. Décision : on propose à Mgr de n'accorder que 3 s. à chacun des 5 enfants jusqu'à 18 ans (54 l. X 5)
26. Duval, 75 ans, St Malo : cet homme est de l'île Royale, et dans la misère ; on propose de lui conserver la subsistance attendu son grand âge. (108 l.)
27. François Fardet, 91 ans, St Malo. Cet homme a servi à Louisbourg ; il est infirme et n'a rien. Son grand âge mérite des égards, on propose de lui conserver le traitement (108 l.)
28. Gautier, Joseph Henry, 5 ans, La Rochelle. Le Père avait bien servi en Canada en qualité de capitaine de port ; il a été envoyé en la même qualité à Gorée, où il est mort sans bien. Cet enfant est digne des grâces du roi pour les services de son père, on propose un traitement de 3 s jusqu'à 18 ans. (54 l.)
29. Gombert, Madgelaine, 16 ans, Rochefort. Cette fille qui a perdu ses père et mère est élevée aux orphelins de Rochefort avec les 6 s par jour qui lui avaient été accordés. ON propose de l'employer jusqu'à 18 ans. 108 l.
30. Jourdan, Julien 63 ans, la Rochelle
31. Philipeau, sa femme, 54 ans.
Ils avaient du bien à l'île Royale ; ils ont tout perdu et n'ont que la subsistance pour vivre. On propose, attendu leurs infirmités, de leur accorder 3 s. à chacun. 54 + 54.
32. Laforest, Marie Catherine, 37 ans, Rochefort. Elle est soeur du feu Sr La Forest, major à Cayenne, ancien officier de l'île Royale. Elle n'a pas été comprise sur le rôle des pension parce qu'elle n'était pas en France. On propose de la comprendre sur le rôle des pensions pour 108 l.
33. Le Lièvre 64 ans, St Malo
34. Alain, sa femme, 51 ans
Cet homme a toujours été employé à l'artillerie et le service des bombes lui a fait perdre l'ouie, il est hors d'état de gagner sa vie. Attendu les services du mari, on propose d'accorder 3s à chacun. 54 + 54
35. Le Moule, Etienne, 14 ans, La Rochelle. Son père était garde magasin à Louisbourg, cet enfant est orphelin, et n'a rien. On propose de lui accorder la subsistance jusqu'à l'âge de 18 ans (108 l.)
36. et 37 Malguerie et sa femme, 74 et 43 ans
38 à 40 : leurs 3 enfants de 11 à 15 ans
La Rochelle. Le père a servi pendant le siège de Louisbourg, en qualité de capitaine de milices, et cette famille qui était à son aise, a tout perdu. On propose d'accorder la subsistance à vie au père et à la mère, et jusqu'à 18 ans aux 3 enfants dénommés. (5 X 108 l.)
41. Marchand, veuve Brilland, 59 ans, la ROchelle. Elle était hospitalière à Louisbourg, pendant le siège et elle est très infirme. Attendu ses pensions et ses infirmités, on propose de lui conserver la subsistance. (108 livres).
42. Mukine, Christine. 14 ans, Rochefort. Cette fille est allemande, son père et mère sont morts à Cayenne, elle est élevée au couvent des orphelins de Rochefort. Attendu sa qualité d'étrangère, on propose de lui conserver la subsistance jusqu'à 18 ans. (108 livres)
43. Pelcha, Gabrielle, 9 ans, St Malo. Son père et sa mère qui étaient de l'île Royale sont à Cayenne, on ignore s'ils existent. On propose de conserver le traitement jusqu'à 18 ans et d'écrire à Cayenne pour savoir si le père et la mère sont existants, pour la leur renvoyer. (108 l.)
44. Porcher, 6 ans, Rochefort. Le père de cet enfant était charpentier du Roi à St. Domingue : son fils est élevé par un ouvrier du port de Rochefort auquel on remet la subsistance. On propose de soulager cet ouvrier généreux en accordant à l'enfant la demie paye de 3 sous par jours jusqu'à 18 ans. (54 l.)
45. Phelipot, 82 ans
46. Bazin, sa femme, 58 ans.
47. Marie Anne, leur fille. 15 ans
St. Malo : cet homme est tout à fait grabataire, et n'a rien, sa femme est infirme ; et sa fille imbécile. On propose d'accorder 6s au père, 3s à la mère, et 3 s à la fille. (108, 54, 54)
48. Rembourg, Marie Jeanne, 9 ans
49. Jeanne Françoise, 7 ans
50. François René, 5 ans,
Saint-Malo. Elles sont issues de l'ile Royale, et n'ont rien pour vivre. On propose de leur accorder à chacune 3s par jour jusqu'à 18 ans.
51. Vagner, 30 ans, Rochefort. Il était tourneur de meule, il a perdu la vue à Cayenne, et si on lui otait la subsistance, il faudrait le mettre dans une maison de piété. Attendu la position de cet homme, on propose de lui accorder à vie 108 l. (108)
52. Tournay, Marie Thérèse, 16 ans, Rochefort, Elle est fille d'un sieur ci devant des troupes de l'île Royale, qui avait gagné son grade par la bayonnette, et qui est mort sans bien. On propose de lui conserver la subsistance jusqu'à 18 ans (108 livres)
53. Sannesic, 39 ans, Rochefort. Sa qualité de sauvagesse la rend susceptible des grâces du Roi, elle s'est réfugiée en France avec la famille Beaubassin. On propose de lui accorder à vie 6 s. par jour. (108 l.)
[il est intéressant de noter que cette sauvagesse apparait en dernier, comme les filles apparaissent en dernier dans les listes de prénoms qui font toujours figurer les garçons en premier].
en dessous : approuvé. [pour tous les articles]
Notes
retranscrit depuis RAPC 1905, vol. 2 (le début du texte) ; puis la suite du texte depuis AN Col C11 D 8
Le mémoire est par ailleurs non signé.
Mots-clés
// sauvage indemnisée
// solde et pension : modalités
// rassemblement
// RED
// étranger : désigne ici uniquement les Allemands
// secours : île Royale
// secours : près de 100,000 l/ an pour officiers + habitants de l'AS - est ensui
Numéro de document
001204